Faria BEMBO DILUSIELA
Assistant à l’Université Pédagogique Nationale et Chercheur associé à l’Institut de Recherche en Géopolitique et d’Etudes Stratégique/Kinshasa-RDC
RESUME
Parmi les questions majeures auxquelles la colonisation a dû faire face, figurent, a écrit Mwene Batende Gaston[1], les nationalismes politico-religieux. Ils se sont présentés comme des espaces d’éveil spirituel et politique durant la colonisation. Le plus grand et le plus connu de ces mouvements demeure, sans conteste, le Kimbanguisme.
L’avènement de son fondateur, Simon Kimbangu, dans le Bas-Congo, a constitué un tournant décisif dans l’histoire coloniale belge. Son émergence sur la scène politico-religieuse a mis en branle l’édifice colonial et demeure le point de départ d’une prise de conscience, par les colonisés, de leur personnalité subjuguée par une puissance étrangère et d’un souci ardant d’affirmation de leur identité propre.
Dès son entrée fulgurante dans l’histoire coloniale, Simon Kimbangu apparaît, aux yeux de ses contemporains et des générations présentes, comme une figure de proue, comme un homme exceptionnel, comme un Prométhée noir, prêt à accepter le sacrifice suprême pour la libération de son peuple. Malheureusement, malgré tout ce qu’il a fait, allant même jusqu’à sacrifier sa vie pour la libération de son peuple et de sa race, le Prophète Simon Kimbangu n’est toujours pas encore reconnu comme Héros, le prototype pourtant des Héros africains. Son histoire est réduite à celle d’un simple citoyen, pire, d’un commun des mortels oublié.
Mots-clés : Simon Kimbangu, Héros national, nationalisme
INTRODUCTION
La colonisation belge au Congo fut l’une des colonisations aussi cruelles que dévastatrices qu’a connues l’Afrique au lendemain de son contact avec l’Europe. A cause bien entendu de ce qu’on a appelé jadis « les abus du système colonial belge », les Congolais prirent petit à petit conscience de leur domination, se regroupant dès lors dans des mouvements socioculturels qui se muèrent plus tard en partis politiques, contraignant ainsi les Belges à accorder l’indépendance à leur colonie.
Parmi ces Congolais, l’un d’entre eux, dont Patrice-Emery Lumumba, fut proclamé héros national le 30 juin 1966, suivi, 35 ans après, soit en 2001, de Laurent-Désiré Kabila qui, lui aussi, a été élevé au rang de héros national, quelques jours après son assassinat.
Or, quatre décennies avant l’apparition même de ces mouvements dits pré-politiques, en 1921 précisément, un des rares fils du pays, en la personne de Simon Kimbangu Diatungunua, prononça déjà le mot « Kimpuanza » (indépendance), luttant jusqu’à donner en rançon sa vie pour l’émancipation de l’homme noir en général, et des Congolais en particulier, alors que ces derniers étaient encore ignorants, c’est-à-dire qu’ils ne connaissaient pas encore ce que c’est que l’indépendance.
En effet, et comme d’aucuns ne le savent, tout l’enseignement de Simon Kimbangu tournait autour de la dénonciation des sévices infligés aux Noirs en général, et aux Congolais en particulier, mais aussi de la lutte pour leur libération sur tous les plans : politique, économique, spirituel…
Pour s’en convaincre, Mengi Kilandamoko écrit : « Votre seule Eglise, votre seule religion, c’est la Bible. Mais en ce qui le concerne, lui personnellement, il a une mission spéciale, celle de prêcher et de libérer l’homme noir du joug colonial ».[2]
Ainsi, à cause de tant d’espoir et d’engouement suscités par ses nombreux miracles accomplis, dont 146 cas de morts ressuscités et 18.000 malades guéris, usines, entreprises, plantations, chemin de fer, hôpitaux et j’en passe, étaient désertés, alors qu’à cette époque-là, le déplacement d’un territoire à un autre devait être sanctionné par un laissez-passer. Venez à moi, vous tous qui peinez et qui êtes chargés, et moi je vous réconforterai lit-on dans les Ecritures Saintes (Matthieu 11 :28). Ainsi, tous ceux qui avaient quelque charge, affluaient-ils vers Nkamba, afin d’en être délivrés.
La vie économique risquait à cet effet d’être interrompue, les hôpitaux se vidant de patients chaque jour qui passait, car Kimbangu guérissait toutes sortes de maladies, faisant ainsi du village Nkamba un des centres d’attraction jamais vécu à l’époque coloniale. Ce qui inquiète ses détracteurs qui lui prêtent des intentions politiques.
Sa déclaration selon laquelle « les Blancs deviendront des Noirs et les Noirs des Blancs », venait de confirmer la thèse selon laquelle Kimbangu était un fauteur de troubles et fomenteur d’une rébellion ayant pour objectif le renversement du pouvoir colonial et donc, chasser, grâce à la population qu’il drainait, des Blancs du Congo.
Très vite, Kimbangu est dans le collimateur de la triade qui formait le socle du pouvoir colonial, à savoir : l’église, le monde des affaires et l’administration coloniale. Présenté à cet effet comme subversif, troublant l’ordre public, Simon Kimbangu est traqué, puis arrêté. Condamné d’abord à la peine capitale, il verra sa peine commuée à un emprisonnement à perpétuité.
L’emprisonnement[3] de Simon Kimbangu était exceptionnel dans la mesure où il avait droit, ce qui n’était pas le cas pour les autres prisonniers, à 120 coups de fouet chaque jour. Ce qui fait un total de 1.314.000 coups de fouet reçus durant ses 30 années d’incarcération.
Cette série journalière de fouet était de temps à autre accompagnée d’un autre supplice consistant à le jeter dans un puits en béton mesurant 1,50m de hauteur, lequel puits était rempli d’eau extrêmement salée, où il passait une à deux heures du temps, afin de le faire souffrir davantage et donc de provoquer sa mort précoce.
Au regard du combat mené par le prophète Simon Kimbangu qui se disait lui–même être le « Mvuluzi »[4] de la race noire, nous sommes en droit d’affirmer sans crainte d’être contredit qu’il est non seulement le précurseur, mais aussi le Père par essence de l’indépendance de la RD Congo, et qu’il mérite sans contestation aucune d’être élevé au rang de héros national.
Malheureusement, bien que tant de choses ont été dites et faites en son honneur, notamment son admission dans l’Ordre National des Héros Nationaux Kabila-Lumumba, à travers l’ordonnance n°10/051 du 29 juin 2010, et son élévation au grade de Grand Cordon de l’Ordre National du Léopard, suivies finalement par la tenue d’un jugement à titre posthume, dont la déclaration finale a remis en cause la condamnation arbitraire dont était victime Kimbangu par l’Administration coloniale, le déclarant innocent, non coupable, et donc libre de tout mouvement (cfr. Arrêt RR 002 du 23 juillet 2011 de la Haute Cour Militaire), nous sommes au regret de constater qu’aucune voix ne s’élève dans ce sens, l’histoire du Mvuluzi Kimbangu, l’unique Africain à avoir passé 30 ans en prison pour la libération de son pays, est réduite à une histoire d’un nébuleux intervenant dans l’histoire de la décolonisation du Congo-belge.
En abordant donc ce sujet, notre souci est de retracer les grandes lignes de la lutte menée par le prophète Simon Kimbangu, pour non seulement démontrer comment sa vie constitue la vraie histoire d’un héros national malheureusement oublié, mais aussi ramener les dirigeants politiques congolais à la raison, afin de le proclamer Héros national, lui qui a osé à cette époque-là déjà, tenir un langage qui défiait aussi bien la puissance coloniale belge que la suprématie de l’Homme blanc sur le Noir, et qui, à coup sûr, et pour diverses raisons, devait se solder par la sanction la plus sévère qui soit aux yeux des autres Congolais : La Mort. La Mort pour la cause de son pays et de sa race.
Pour y arriver, d’une part, nous avons recouru à la méthode historique qui nous a permis de retracer les faits tels qu’ils se sont déroulés, lesquels faits ont été sévèrement critiqués avant d’en accepter l’authenticité, tout en respectant la chronologie qui est l’une des caractéristiques fondamentales de cette méthode et, d’autre part, quant au fond, nous avons été amené à diviser successivement cette étude en six points principaux. Le premier se focalise sur des précisions terminologiques, où nous allons définir les concepts « histoire » et « héros », avant de donner les caractéristiques d’un héros. Le deuxième point se fonde sur l’identité et la mission du prophète Simon Kimbangu.
La question liée à la fin brutale de la mission directe et humaine de Simon Kimbangu constitue le troisième point. Quant au quatrième, il relève les contradictions et contestations dont font l’objet certains faits kimbanguistes. Ce point sera suivi par un autre qui abordera à son tour la question cadrant avec Simon Kimbangu : Héros national ou commun des mortels oublié ? La série sera bouclée par une étude comparative entre le bouddhisme et le kimbanguisme, source d’inspiration et de puissance. Tous ces points sont coiffés par une introduction et une conclusion. Venons-en donc au premier point.
I. PRECISIONS TERMINOLOGIQUES
L’éclaircissement par l’auteur des termes clés d’une étude scientifique, est un exercice louable qui facilite la compréhension intrinsèque de ladite étude. Ainsi, deux concepts méritent ici d’être déballés, à savoir : « Histoire » et « Héros ».
Abordant l’examen du premier concept, il faut immédiatement faire savoir que la définition du concept « histoire » est une entreprise difficile, car ce concept est plurivoque, c’est-à-dire, il se définit de plusieurs manières, selon la direction que tel ou tel autre auteur ou chercheur oriente son étude. Mais avant d’en arriver là, faisons également remarquer que beaucoup d’analystes se demandent si l’histoire est une science au vrai sens du mot, car alors que toutes les autres sciences comme la mathématique, l’économie, la physique… portent sur des généralités, elle, porte sur les événements particuliers et contingents. Elle étudie un passé qui ne peut être objet de connaissance expérimentale.
En effet, « les sciences fortement constituées comme la physique, la chimie et la biologie, instaurent un dialogue de l’expérimentation, qui suppose l’usage des instruments appropriés, et des modèles formels qui visent à informer l’expérience. Cette caractéristique fait de ces disciplines des « Sciences empirico-formelles ».[5] Ce qui n’est pas le cas avec l’histoire qui, bien que s’intéressant à la diachronie, c’est-à-dire à la succession des événements dans le temps, succession dont elle cherche à dégager la notion de causalité historique, elle se fonde sur des événements se présentant comme des spéculations, difficile d’en faire une connaissance expérimentale.
Mais elle vise à la vérité ; elle exige l’esprit scientifique ; elle a une méthode. Qu’à cela ne tienne, l’histoire est, au sens le plus général du mot, l’étude du passé ; au sens le plus habituel, l’étude du passé des sociétés humaines. Cependant, pour Hegel, au premier abord, histoire signifie narration des événements contingents des époques, des peuples et des individus, contingents soit suivant leur succession dans le temps, soit suivant leur contenu.[6]
Par l’histoire, écrit Buakasa TuluKia Mpanzu, il faut entendre des réalités précisément données comme formations réalisées dans le procès et le cours des rapports des hommes entre eux et avec la nature ou le monde qui les entoure, tels que ces rapports sont organisés, contestés ou reproduits par eux-mêmes. Ces réalités sont, entre autres, les formations sociales ou sociétés globales, les formations politiques, les formations économiques, les formations psychologiques, les formations idéologiques, les formations philosophiques, etc.[7]
Pour la Brochure des Témoins de Jéhovah « Réveillez-vous ! », publiée sous le titre phare de « Quelles leçons tirons-nous du passé ? », l’histoire nous enseigne des leçons lourdes de sens pour l’avenir.[8]
Alors que pour Kambayi Bwatshia, cité par Bembo Dilusiela, dans son article intitulé : « Perception de l’enseignement d’histoire par les élèves de classes terminales du niveau secondaire selon une enquête effectuée auprès de 10 écoles de Kinshasa en 2014 », l’histoire est la façon d’éclairer le sens des événements, de mettre la lumière, d’éclairer l’avènement de l’événement. C’est la recherche du comment et du pourquoi qui aboutit à la restitution, à la contextualisation de l’événement ».[9]
En ce qui nous concerne, nous définissons l’histoire comme une science évolutionnelle qui étudie la somme d’activités de l’homme depuis son apparition sur la terre, et qui utilise comme source et matériel didactique : le passé.
Quant au deuxième concept, Héros, il faut aussi dire qu’étymologiquement, et selon le dictionnaire encyclopédique « petit Larousse », le mot « héros » tire son origine du grec « Héros », qui est un nom donné par les Grecs aux demi-dieux ou aux grands hommes divinisés. C’est aussi celui qui se distingue par des qualités, des vertus ou des actions extraordinaires, particulièrement à la guerre ; principal personnage d’une œuvre de fiction, d’un poème, d’un roman, d’une aventure. C’est la personne qui tient le rôle principal dans un événement.
L’histoire nous renseigne que le terme « héros » fut au départ une simple épithète, se rapportant à un fait ou à un rite dont la signification fut très tôt perdue. Dès lors, l’esprit grec individualisa le phénomène religieux, il inventa un personnage autour du cercueil duquel se construit une légende.
En effet, à l’origine du mot « héros », le besoin était en quelque sorte légitime. Puisqu’il fallait, chez les Grecs, être mort pour être reconnu héros, c’est-à-dire l’objet d’un culte. A partir du Ve siècle après J.C, le héros devient un mortel héroïsé ; après sa mort, il est honoré par un culte. L’héroïsation exprimait la reconnaissance d’une cité envers l’un de ses citoyens, tel est le culte rendu aux Tyrannicides, aux Athéniens, etc.[10]
A l’époque hellénistique, tout mort pouvait devenir pour sa famille un héros. Dans toutes les civilisations, le culte de héros se traduit par la représentation de leurs exploits. Il en fut ainsi en Mésopotamie pour les héros mythologiques, les stratèges, les philosophes, les poètes et les athlètes, etc.
Pour nous, un « héros » est un patriote, un nationaliste avéré qui, au regard de tous les risques qui le guettent, accepte de se sacrifier afin de faire triompher l’intérêt ou les intérêts de sa patrie, de son peuple. C’est aussi un personnage phénoménal qui surprend par ses prises de position et ses actions, et qui, à la manière d’un philanthrope, exprime un amour sans faille pour ses pairs se trouvant dans une situation d’impasse, tout en s’efforçant d’améliorer leurs conditions, même au risque de se donner lui-même en rançon.
Bien avant toutes les interprétations modernes, Platon montre que le héros est le symbole de l’âme immortelle (Mémo 810), que sa naissance manifeste (179 b-d) dépeint le pur héroïsme sous le trait d’une femme.
La vie héroïque est glorieuse, semble-t-il, parce qu’elle surmonte les tentations de l’excès et ne pastiche jamais l’une des quatre dimensions essentielles de l’héroïsme. « Noble et expansif, l’exploit héroïque se reconnaît par son pouvoir créateur. Le héros est un modèle non pas par ses actes, qui cesseraient d’être héroïques s’ils étaient répétés, mais par l’appel qu’il nous adresse. Henri Bergson a montré que la société vraiment humaine, ou « société ouverte », est celle qui sait écouter l’appel du héros ».[11] « Le héros est un créateur, il n’est pas un risque-tout ; il n’affronte pas pour dresser un front hautain, mais parce que c’est la condition d’un progrès de l’homme dans l’ordre de l’action ».[12]
« Ainsi les civilisations dites développées ont peu à peu, et paradoxalement, rattrapé, voire dépassé, les pays dits primitifs ou sous-développés, en nationalisant une sorcellerie que l’on appelle péjorativement aujourd’hui, le « culte de la personnalité ». Que son pouvoir soit temporel, comme celui de Gandhi, « sexy » comme celui de Rita Hayworth, l’influx magique reste le même : le fidèle vit en symbiose avec son idole ; il participe imaginairement à sa vie et il s’identifie mimétiquement à elle. L’influx reste donc le même, mais il ne circule plus de la même façon dans les sociétés modernes ».[13]
Le mythe du héros tente de satisfaire ce besoin universel d’admirer et il enchante nos rêves ; ce mythe est donc ambivalent : il peut réveiller la noblesse humaine ou la plonger dans un engloutissement idolâtre. Le sursaut héroïque est l’acte créateur qui se prépare dans le silence, à l’insu de tous, y compris de celui qui va remporter (pas plus qu’il ne se regarde, le héros ne se prépare).L’héroïsme ne procède d’aucun calcul, d’aucune recherche ; il se produit avec simplicité, et rejette ainsi dans les marais toutes les contorsions plus ou moins habiles de risque-tout.
II. DE L’IDENTITE ET DE LA MISSION DU PROPHETE SIMON KIMBANGU
II. 1. Présentation biographique de Simon Kimbangu
Simon Kimbangu, affectueusement appelé « Mfumu », chef, est le fils de Kuyela et Luezi. Né le mercredi 12 septembre 1887, dans un petit village du sud-ouest de la République Démocratique du Congo,-Nkamba, surnommé « Nouvelle Jérusalem » ou encore « la Mecque Kimbanguiste »-, situé dans la province du Kongo Central, dans le district des Cataractes, collectivité de Ntimansi, groupement de Nzundu, précisément dans la contrée de Bangu, territoire de Mbanza-Ngungu.
Ayant perdu ses parents à bas âge, Kimbangu fut élevé par sa tante maternelle Marie Kinzembo. Son nom signifie : « celui qui révèle le sens des choses cachées »[14], mieux le « Révélateur ».
A la mort de ses parents, « l’enfant Kimbangu grandira comme tous les autres enfants du village, mais avec une éducation chrétienne solide. Et, sa différence se manifestait au milieu de ses camarades dans le village. C’était un enfant respectueux, poli et obéissant ».[15]
Après quatre ans d’études primaires à Ngombe Lutete, niveau tout à fait acceptable à son époque et qui inspirait l’admiration, Simon Kimbangu se convertit au protestantisme par le biais de la Baptist Missionary Society (BMS), et se montra très assidu dans la lecture de la Bible et devint un chrétien engagé et catéchiste. « Le 04 juillet 1915, il fut baptisé dans la rivière Tombe à la mission protestante de Vula. C’est ce jour-là aussi qu’il contracta son mariage religieux avec Maman Marie Muilu Kiawanga »[16], avec qui il a eu trois enfants dont Kisolokele Lukelo Charles, Dialungana Kiangani Salomon et Diangienda Kuntima Joseph. Précisons à ce niveau que, Marie Muilu était de sept ans plus âgée que Kimbangu.
Ayant fait l’étude anthroponymique du nom Kimbangu, Joseph Zidi fait savoir ce qui suit : « L’anthroponyme Kimbangu vient du préfixe ‘‘ki’’, qui désigne le sujet, l’auteur, celui qui fait l’action et du radicale « mbangu » qui veut dire maîtrise, habileté, savoir-faire. Mbangu [et/ou Mbambu] est aussi un coffret traditionnel dont la fonction essentielle est de fructifier l’argent, de créer de la richesse profitable à la famille du détenteur. Du verbe bangumuka, le diminutif kimbangu exprime ce qui plane au-dessus de. De même, du verbe banguka : [et/ou Bangula] dénouer, porter à la lumière, révéler. Kimbangu est celui qui révèle l’essence des choses cachées (Mbangudi’afikayasuekama, yeya tombe). Kimbangu se comprend aussi par celui qui rend témoignage. Selon le sociologue français, Georges Balandier, Kimbangu symbolise dans l’imaginaire kongo : le drapeau, le Chef, l’échelle, le bateau portant l’âme, le chemin de l’âme ».[17]
Ainsi, pendant que la colonisation belge battait encore son plein au Congo, avec toutes les injustices et les humiliations y afférentes, Kimbangu reçut la mission divine, celle de libérer l’homme noir en général, et les Congolais en particulier du joug colonial, et de les amener vers un meilleur destin.
« A vrai dire, la pensée de Papa Simon Kimbangu tire son origine de la situation existentielle, celle de la condition de la race noire, colonisée, chosifiée, réduite sur les plans ontologique, épistémologique, théologique et sociologique. D’une façon pragmatique, il a non seulement stigmatisé les méfaits de la colonisation, mais bien plus, il a pris des positions franches et catégoriques vis-à-vis de ce système avilissant. Il a agi sur lui en posant des actes libérateurs concrets : guérisons des malades, résurrection des morts, consolation des désespérés, solidarité et assistance envers tous les pèlerins qui affluaient à N’Kamba et cela sans discrimination ». Il a procédé à la conscientisation de ses concitoyens en vue de reconquérir leur dignité humaine en tant que créés à l’image et à la ressemblance de Dieu au même titre que d’autres races ». [18]
Au regard de ce qui précède, la question que nous nous posons est celle de savoir : Quelle était la mission dévolue à Simon Kimbangu ? C’est ce à quoi nous voulons nous atteler dans le point ci-après.
II. 2. Mission du prophète Simon Kimbangu
II. 2. 1. Le début de son ministère
Tout est parti, rapporte Faustin Alipanazanga, « en 1918, tandis que sévissait l’épidémie de la fièvre jaune dans son village et que les gens en mourraient par centaines faute d’assistance médicale, Simon Kimbangu, ami de la Bible et homme de la prière, entendra pour la première fois une voix qui lui dira : « Je suis le Christ. Mes serviteurs sont infidèles. Je te choisis pour que tu rendes témoignage à tes frères et les convertisses. Pais mes troupeaux ». Et Simon Kimbangu de répondre : « Je ne suis pas instruit. Il y a des pasteurs et des diacres de Ngongo Lutete qui peuvent accomplir cette tâche ».[19]
Cette voix ne cessait de l’appeler, et sa femme l’entendait répondre à la voix de l’invisible, ce qui poussa Kimbangu à fuir à Kinshasa vers la fin de l’année 1918, où il chercha à se faire embaucher. La chance lui sourit. Kimbangu fut engagé aux Huileries du Congo-Belge (HCB) comme pointeur honnête, mais il en est sorti sans avoir perçu un seul rond ! Quelqu’un d’inconnu touchait à son insu ses appointements à chaque paie mensuelle.
En dehors de cette réalité malheureuse, Kimbangu avait rencontré beaucoup d’autres problèmes à Kinshasa, lesquels problèmes l’obligèrent de se lancer dans le commerce des chikwangues, mais sans succès car, la voix qu’il entendait ne cessait de le poursuivre. Ce qui l’obligea de retourner à Nkamba pour renouer avec ses travaux champêtres, tout en continuant de faire le catéchiste. De là, tout commencera.
Ainsi donc, Simon Kimbangu débuta son ministère de guérison et d’évangélisation en 1921. En effet, « le soir du 05 avril 1921, chose inhabituelle, Simon Kimbangu demanda à son épouse d’aller sonner la cloche de l’église, le lendemain à 6 heures du matin. Celle-ci, qui n’était pas ignorante de la destinée de son époux, ne se donna pas la peine de demander le pourquoi de ce geste. C’est ainsi que le 06 avril 1921 à 6 heures, elle alla effectivement sonner la cloche, comme cela lui avait été demandé la veille ».[20]
« Dès lors, ses amis répandirent aussitôt la nouvelle qu’il était l’Envoyé de Dieu sur terre ; de même que Jésus-Christ a délivré la race blanche [plus précisément les brebis perdues de la tribu de Juda] et Mahomet les Arabes, Kimbangu délivrerait la race noire. Or à cette époque, les « Prophètes », vrais et faux, étaient systématiquement, pris en chasse par les Belges ».[21]
Ses enseignements, accompagnés des miracles et prodiges, firent de lui l’un de ces prophètes si redoutables que l’humanité ait connu, qu’il faille dire un mot là-dessus.
II. 2. 2. Ses enseignements et ses miracles
Avant d’aborder ce point, il nous paraît intéressant de préciser qu’il existe une divergence de vues sur la provenance du pouvoir spirituel que possédait Kimbangu. Si une tendance soutient que Simon Kimbangu était un chrétien, et que la Bible serait la base de ses enseignements parce qu’envoyé par Jésus-Christ pour propager son évangile, une autre tendance s’y oppose et se demande au même moment comment, lui qui était certes au départ chrétien et catéchiste de surcroît à la Baptist Missionary Society (BMS), où il était même baptisé, pouvait-il faire l’objet de chasse à l’homme par ses « frères» blancs qui l’ont finalement arrêté, incarcéré jusqu’à sa mort, s’ils servaient tous Jésus–Christ ?
La réponse à cette question est en partie donnée dans les lignes qui précèdent : Mes serviteurs, c’est-à-dire les missionnaires, auprès de qui Kimbangu s’est converti en chrétien, étaient devenus infidèles devant Dieu, qu’il fallait que ce dernier, dans sa souveraineté, se choisisse d’autres serviteurs dont Kimbangu, pour restaurer, rétablir, remettre l’ordre dans les affaires de Dieu.
En effet, et comme le fait savoir Faustin Alipanazanga, « la réduction de l’homme noir en général reposait sur les légitimations religieuses des entreprises coloniales par des discours tronqués et idéologies chosifiantes. Par des affirmations gratuites et des herméneutiques tordues des Ecritures Saintes et de la tradition de l’Eglise que des mentalités de l’époque coloniale lui ont infligées. L’homme Noir a été considéré successivement comme « ennemi du Christ », « descendant de Cham le maudit » et « inculte et grand enfant » à civiliser et à éduquer[22].
« Pourtant, une telle justification n’allait pas suffire à elle seule, car il s’avérait difficile, pour une religion universelle se fondant sur l’annonce du salut à tous les hommes, d’imputer au patriarche par qui Dieu avait sauvé l’humanité du déluge, le malheur d’une multitude de nations ».[23]
Sans pourtant chercher à entrer dans une polémique sur des questions du monogénisme et du polygénisme(les Noirs seraient-ils une humanité manquée ? Descendraient-ils d’Adam ou auraient-ils, contrairement à d’autres peuples, une origine pré-adamique ? Etc.), nous disons que la façon de voir du missionnaire s’écartait largement de la pensée du Christ qui, dans le livre de Jean 15 :12, a recommandé aux disciples de s’aimer les uns les autres, comme il les a lui-même aimés. N’est-ce pas aussi vrai que dans Jérémie 29 :11, l’Eternel Dieu reconnaît avoir formé pour l’homme, sans distinction de couleurs, des projets de paix et non de malheur, afin de donner à celui-ci un avenir et l’espérance ? Et que le traitement infligé à l’homme Noir par les missionnaires ne reflétait pas la volonté de Dieu, qu’ils ont mérité le revirement de la situation ?
Aussi, à cause certes de nombreux miracles et prodiges opérés de la main du prophète Simon Kimbangu, réalisations dont les missionnaires, qui prétendaient être les représentants et les intermédiaires avérés et incontestés entre Dieu et l’homme Noir, auprès de qui ce dernier a appris, selon eux, l’existence de Dieu, le Noir n’ayant pas connu, croyaient-ils, le Véritable Dieu, n’en étaient pas capables.
Leur incapacité à mettre en pratique le verset biblique selon lequel : « Voici les miracles qui accompagneront ceux qui auront cru : en mon nom, ils chasseront les démons ; ils parleront de nouvelles langues, ils saisiront des serpents, s’ils boivent quelque breuvage mortel, il ne leur fera point de mal ; ils imposeront les mains aux malades, et les malades seront guéris » (Marc 16 :17-18), verset dont Kimbangu a, dans toutes ses dimensions, mis en pratique, provoquant ainsi la fuite des malades des hôpitaux, des travailleurs des lieux de service… , ne pouvait que susciter le mécontentement et la colère, non seulement des missionnaires, mais également des colons et des hommes d’affaires, qu’il fallait impérativement mettre fin à la vie de Kimbangu.
Les Noirs qu’on devrait à tout prix garder au rang des ignorants, venaient de comprendre que Dieu ne travaille pas seulement avec les Blancs, mais avec quiconque lui obéit. Simon Pierre, disciple de Jésus-Christ, confirme cette assertion dans le livre des Actes des Apôtres 10, dans ses versets 34 et 35, ou il déclare : « Maintenant, je comprends vraiment que Dieu n’agit pas différemment selon les personnes : tout homme, de n’importe quelle nationalité, qui le respecte et fait ce qui est juste lui est agréable ».
Par ailleurs, et toujours en rapport avec la Bible, qui ne reconnaît que Jésus-Christ comme l’Unique Sauveur de l’humanité[24], pourquoi alors douter de la qualité de sauveur dont s’est réclamé, à juste titre d’ailleurs, Simon Kimbangu lors de son procès à Mbanza-Ngungu, si l’on tient notamment compte des faits suivants dont il était l’auteur : ébranlement de la pérennité de la puissance coloniale belge ; audace de braver l’autorité coloniale lors de ses prédications, en cherchant notamment à délivrer l’homme noir du joug du colonisateur (homme blanc) ; miracles et prodiges en près de 3 mois, dont le nombre et l’ampleur dépassent même ceux opérés par Jésus-Christ en 3 ans et demi de ministère, etc. Cette déclaration prophétique a également constitué une justification de sa traque par ses détracteurs.
En effet, nous avons dit à juste titre car, dans le livre de Deutéronome 32 :8-9, il est écrit : « Lorsque le Dieu Très-Haut a reparti les pays entre les hommes, il a fixé les frontières des nations, il a placé chaque peuple sous l’autorité d’un être céleste ».
Pour ceux qui ne le savent pas, l’Afrique avait, à cause des souffrances infligées aux Israélites retenus en esclavage en Egypte, une dette spirituelle de 430 ans à purger. Avec l’arrivée de l’Homme blanc en Afrique, et surtout avec la conversion du roi Nzinga Nkuvu au christianisme, lequel roi a accepté par la suite de se faire baptiser en 1491, l’Afrique venait d’entrer, sans le savoir, dans le processus d’épuration de sa dette.[25]
1921, année à laquelle le Prophète Simon Kimbangu débuta son ministère marque, spirituellement, le point d’achèvement de ladite dette, car les 430 ans d’assujettissement, de sa souffrance et de malheur qu’endure malheureusement le continent noir jusqu’à ce jour, venaient d’arriver à leur terme.[26]Il eut fallu dès lors que Dieu le créateur, dans sa justice, et comme il l’a fait avec le peuple hébreux, auprès de qui il a envoyé Moïse comme sauveur, choisisse quelqu’un pour sauver la race noire.
Cette vérité non étriquée poussa, à juste titre d’ailleurs, MabikaKalanda à écrire : « La puissance de Dieu qui se manifeste partout, chez tous les peuples et à toutes les époques, s’est manifestée au Congo par son Prophète Simon Kimbangu ».[27]
Au regard de ce qui précède, comment ne pas croire que Kimbangu est le sauveur de la race noire ?
Sans pourtant chercher à nous étendre davantage sur cette polémique sans issue, rappelons avec Motere Yekima Michel que, « la vocation et le ministère de Papa Simon Kimbangu interviennent à un moment décisif où le peuple congolais est sous la domination coloniale belge. Les indigènes n’ont rien à dire ; ils ne sont pas représentés dans les organes directeurs du pays. A cette époque-là, l’homme noir était considéré comme un sauvage, un infrahumain, un primitif. Il était rejeté. Il constituait une race inférieure vouée à la servitude. Sa couleur symbolisait le maudit, l’obscurité, l’ignorance, la faiblesse, l’être inférieur, affublé d’une débilité intellectuelle déroutante. C’est dans cet ordre d’idées qu’un français [Johny Halliday] a chanté « Noir, c’est noir …, il n’y a point d’espoir ! ».[28]
C’’est ainsi qu’on voyait dans certaines églises à l’époque coloniale, poursuit Motere, des statuettes de Dieu, de Jésus, des anges teintes en Blanc (race de Dieu) et tandis que celles du diable et ses diablotins étaient représentées en couleur noire.[29]
Fustigé et gêné par les discours haineux des Blancs, la réaction la plus vive de Simon Kimbangu sera : « L’homme noir deviendra l’homme blanc et l’homme blanc deviendra l’homme noir », ce qui revient à dire que quelle que soit la durée de l’assujettissement de l’homme noir par l’homme blanc, il finira tôt ou tard par récupérer sa place d’antan, il lui suffit de se disposer spirituellement et d’être connecté avec son créateur.
Dans le domaine politique, Simon Kimbangu, fit prendre conscience à ses frères de race qu’ils vivaient sous le joug colonial, et que s’affranchir de l’homme blanc était la première des libertés que tout peuple dominé se doit d’arracher, s’il tient à être traité d’égal avec les autres. Car, certaines autres formes de liberté ne sont qu’une conséquence logique de la liberté politique.
Renforçant son opposition à l’égard de l’occupation coloniale belge, Simon Kimbangu n’hésita pas de demander à ses adeptes de ne plus jamais payer les impôts, et le thème ayant trait à l’indépendance fut l’objet des cantiques. Il alla plus loin : « Que les Blancs envahisseurs, source des souffrances, s’en aillent…Qu’on ne leur fasse plus de plantations. Qu’on ne leur vende plus d’amandes de palme. Qu’on déserte leurs industries…Tous les insignes des Blancs, qu’on les rejette…Que chacun abandonne le pagne de deuil et prenne le pagne blanc de la joie, de l’espérance… les Blancs doivent s’en aller… c’est le dernier impôt que nous payons ».[30]
Sur le plan religieux, la prophétie selon laquelle « l’homme noir deviendra l’homme blanc et l’homme blanc deviendra l’homme noir », bouleversa l’esprit des Missionnaires. En effet, « à cette époque-là, on avait la ferme conviction que c’est le missionnaire qui détenait la clef du salut, et que c’est lui qui avait le privilège d’entrer en contact avec Dieu. Et dans la pratique, on s’imaginait que la relation entre Dieu et l’Africain devait impérativement passer par les missionnaires. Cette prophétie peut religieusement signifier que le privilège dont jouissait l’homme blanc d’être serviteur, missionnaire, envoyé de Dieu en terre africaine, peut lui être ôté et confié à l’homme noir. C’est cela qui est arrivé avec la venue de Papa Simon Kimbangu en tant qu’Envoyé Spécial de notre Seigneur Jésus-Christ ».[31]
Afin de prouver à l’homme blanc que Kimbangu était réellement son Envoyé, et que sa mission était effectivement de libérer l’homme noir en général, et les Congolais en particulier de la domination coloniale, Dieu a fait que la lutte de Simon Kimbangu s’accompagne des miracles et prodiges de toutes sortes. En effet, à travers ses prédications, nombreux abandonnèrent d’eux-mêmes les fétiches qu’ils détenaient, d’autres les brûlaient ou encore les remettaient directement à Kimbangu en signe de repentance. Beaucoup d’hommes abandonnèrent la polygamie, et tant d’autres pratiques malsaines, pécheresses.
A ces prodiges, s’ajoutaient toutes sortes de miracles : résurrection des morts, guérisons des malades, délivrance des captifs ; les paralytiques marchaient, les aveugles recouvraient la vue… vidant ainsi les hôpitaux des patients, les usines et autres lieux de travail connaissant la désertification des travailleurs qui affluaient tous vers Nkamba, où la solution à leurs problèmes résidait.
Simon Kimbangu accomplit beaucoup d’autres miracles même pendant qu’il était aux arrêts. Omniprésent, Kimbangu se retrouvait à plusieurs endroits différents entrain de prêcher la Bonne Nouvelle, alors qu’on le voit dans son cachot assis. A Lutendele, alors qu’on cherchait à le tuer, il fut mis dans un tonneau scellé, accroché à une grosse pierre et jeté dans les eaux du fleuve. Il réapparut marchant sur les eaux.
De même, à Kindu, rapporte Motere Yekima, lors du passage de Papa Simon Kimbangu à Ubundu pour Lubumbashi, l’officier belge appela toute la population pour lui dire : Voici Simon Kimbangu, le magicien qui veut freiner le développement de votre pays. La population se ruait sur lui avec des coups. Et enfin, une jeune femme était venue la dernière, elle a pris un rameau sec et a frappé sur le visage de Papa Simon Kimbangu et tout le visage a saigné (du sang). Jusque-là, l’officier belge ne permettait pas à Papa Simon Kimbangu de se laver. Arrivé à Kindu, le visage couvert de sang avec ses chaînes, Papa Simon Kimbangu fut mis dans une maison de transit.[32]
Un lundi matin, Papa Simon Kimbangu demanda à l’officier belge, s’il pouvait ouvrir un peu ses chaînes pour lui permettre de se laver, car depuis Léopoldville, il ne s’était pas baigné. Celui-ci refusa. Mais les chaînes s’ouvrirent d’elles-mêmes et Papa Simon Kimbangu s’en alla se laver.[33]
Par ailleurs, renchérit le même auteur, « pendant qu’il se trouvait en prison à Lubumbashi, il est apparu à cinq endroits notamment à Mbandaka, Boende, Ekafela, Bolafa, Befale en train de prêcher. Et d’un coup, on vint l’arrêter à ces cinq endroits et pour ne se retrouver enfin qu’avec le seul Kimbangu qui est en prison à Lubumbashi.[34]
Le samedi 03 décembre 1921, alors qu’il était enchaîné, Kimbangu empêcha à la gare de Thysville (actuel Mbanza-Ngungu) la locomotive qui devait le transporter à Léopoldville de démarrer, exigeant de rencontrer sa famille, faute de quoi, le train ne pourrait démarrer…Mais le plus grand miracle reste pour nous l’explosion étonnante du mouvement kimbanguiste sous l’époque de l’oppression coloniale, pendant que Kimbangu croupissait en prison à Lubumbashi, laquelle explosion a abouti, quelques années plus tard, à la création d’une église Kimbanguiste à la dimension universelle, pérennisant ainsi le nom de Kimbangu.
Au vu de ce qui précède, et comme l’explique clairement Mengi Kilandamoko, « papa Simon Kimbangu a compris que pour l’homme noir, il faut un Christianisme au centre, c’est-à-dire authentique sur les conditions de possibilité de la nouvelle évangélisation dans le cadre du projet d’une nouvelle société noire. Il s’agit, au fond, d’engager une critique de nationalité chrétienne pathologique qui a présidé à l’implantation du Christianisme sur nos terres à l’aube des temps modernes ».[35]
A cet effet, le prophète Simon Kimbangu n’a-t-il pas raison, au regard de la déclaration faite par le Souverain pontife, le pape Jean Paul II, lors de sa visite en mai 1980 dans cinq pays africains, nous citons : « Le Christ lui-même est africain, et Dieu est noir. Encourageant les Africains à rechercher leur authenticité, il assure que si la sève est celle de l’Eglise universelle [entendez ici l’Eglise Catholique], il faut aussi que les fruits aient la saveur de l’Afrique ».[36]
II. 2. 3. Simon Kimbangu et la lutte pour l’émancipation de l’homme noir
Comme ce fut le cas avec Jésus-Christ qui, dans Mathieu 15 :24, déclare : « Je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël », de même, le prophète Simon Kimbangu a fait savoir qu’il est envoyé pour libérer la race noire.
Aussi, si la mission du Christ n’a duré que trois ans et demi, celle de Simon Kimbangu n’a, à son tour, duré que cinq mois et six jours, dont trois mois de clandestinité, car l’administration coloniale belge n’en était pas favorable, deux mois après le déclenchement de son ministère, compte tenu des conséquences incalculables de son action évangélique, qui bouleversa l’ordre public au sein de la colonie.
Faisons savoir ici que, la spécificité de la lutte qu’a menée Simon Kimbangu se remarqua également par son message puissant qui affirmait l’existence d’un danger physique et métaphysique qui menaçait la race noire. « Ce double danger est le fait du colonialisme et des missionnaires étrangers qui refuseraient, selon Kimbangu, d’enseigner aux Noirs la vraie religion ; le message affirme l’exaltation de la race et la confiance que les Congolais doivent avoir en eux-mêmes.
Il souligne le caractère passager des « épreuves » et des « persécutions » que les Noirs doivent encore subir de la part des Blancs. Ainsi le Noir deviendra le Blanc et le Blanc deviendra le Noir devient une formule de dépassement. Le Kimbanguisme accuse le protestantisme et le catholicisme de s’être écartés de la tradition chrétienne. La preuve de cette déviation serait donnée, selon lui, par le fait que les missionnaires ne guérissent plus les malades, ils ne prophétisent plus, ils ne ressuscitent plus les morts comme insiste le caractère original de la nouvelle Eglise des Noirs : c’est l’Eglise du Saint-Esprit ».[37]
Au fait, le Prophète Simon Kimbangu a combattu l’Homme blanc dans son propre terrain : la Bible, à partir de laquelle il a démontré le caractère déviationniste de la mission des missionnaires et des colons.
III. FIN BRUTALE DE LA MISSION DIRECTE ET HUMAINE DE SIMON KIMBANGU
III. 1. L’arrestation et l’emprisonnement de Simon Kimbangu
La première tentative d’arrestation de Simon Kimbangu fut ordonnée par l’administrateur du territoire de Thysville (actuel Mbanza-Ngungu), Monsieur Moreil, le 06 juin 1921, soit deux mois seulement après le début de son ministère. Kimbangu échappa de justesse à cette arrestation, et ira se cacher dans la forêt de Nsanda, non loin du village Nkamba, où il fera trois mois de clandestinité avant de réapparaître de nouveau le 12 septembre 1921. Pendant sa cachette, plusieurs Noirs que l’on supposait être ses disciples furent arrêtés. Certains furent emprisonnés, alors que d’autres étaient frappés de relégation. « L’Association du Personnel Indigène de la Colonie (APIC) estima le nombre à 37.000 personnes reléguées. Il est difficile de se prononcer aujourd’hui sur ce chiffre. Une chose est vraie : c’est qu’il y eut des relégations disséminées à travers le pays ».[38]
Aussi, c’est le même 12 septembre 1921 que Kimbangu sera arrêté sur ordre, cette fois-ci, de l’Administrateur Cambier, grâce notamment au concours du catéchiste des pères de Scheut : Romain Nkamba, qui a donné des informations fiables sur l’endroit où se trouvait Kimbangu.
Arrêté, Kimbangu fut acheminé à Thysville. L’ampleur de son ministère étant continuelle et effective, cent vingt de ses apôtres et disciples l’accompagnèrent en exécutant des hymnes et la population accourut et chanta avec les prisonniers. La ferveur de cette foule qui accompagnait Kimbangu fit peur et bouleversa les Blancs de Thysville.
Ainsi, un tribunal d’exception, le Conseil de guerre, fut institué pour juger Kimbangu, le territoire de Thysville ayant été placé depuis le mois d’août sous le régime militaire mitigé. Jugé le lundi 03 octobre 1921 le matin, Simon Kimbangu fut condamné à mort.
Faisons savoir à ce niveau que, Kimbangu et tous les autres détenus n’avaient ni avocat, ni défenseur. Ce fut donc, comme on peut le dire, un procès qui viola toutes les notions les plus élémentaires des droits de l’homme. A la fin du mois d’octobre 1921, le Roi Albert de la Belgique commua la peine capitale de Kimbangu à un emprisonnement à perpétuité. Ainsi, Kimbangu fera sa prison à Elisabethville (Lubumbashi) durant 30 ans, dans une cellule mesurant 1,20m de long sur 0,80m de large, où il couchait sur un socle de ciment en forme de lit, recouvert d’une grosse couverture noire, et c’est là où il trouvera la mort.
Mourir à Lubumbashi cache un intérêt spirituel très profond pour la RD Congo. En effet, Lubumbashi, ville qui devrait normalement s’appeler (Lubumba Nsi),du verbe « Kubumba » ou « Kulunda », cacher, mêlé au complément « Nsi » ou « Insi», pays, ce qui signifie littéralement « cacher le pays », reste le lieu où Kimbangu, qui connaissait bien l’intention avarice et sordide des colons, visant à balkaniser son pays après son accession à l’indépendance, est allé dissimuler le Congo-Belge mystérieusement, afin de lui éviter la partition tant souhaitée par les puissances étrangères dont la Belgique.
Ce projet macabre a été dénoncé, comme on peut le rappeler, par Patrice-Emery Lumumba, neuf ans après la mort du prophète Simon Kimbangu où, dans une de ses interviews, il déclara : « […] la Belgique désire balkaniser le Congo. L’éclatement du Congo c’est maintenant !…». L’échec patent de toutes les tentatives de balkanisation de la RD Congo, pays qui ne possède pourtant pas d’armée réellement nationale, ni structurée et équipée, pour être dissuasive, manquant en plus un budget capable de lui permettre de défendre comme il se doit les frontières de ce deuxième grand pays d’Afrique, reste une démonstration éloquente de l’action de Simon Kimbangu.
Bongeli Yeikeloya Ato Emile confirme cette assertion en ces termes : « En effet, la Route du Calvaire de Simon Kimbangu (à l’instar du catholique Chemin de la Croix de Jésus) s’est effectuée autour du mystique Fleuve Congo dont on lui a fait longer le cours de l’embouchure à la source (Kongo Central-Katanga via le Bandundu, l’Equateur, la Province Orientale, le Kivu-Maniema). Quand sa dépouille fut rapatriée du Katanga pour le Bas-Congo, elle le fut par voie terrestre. Le Corps Sacré du Prophète fut ramené par voies ferrée et fluviale, traversant les deux Kasaï (le Grand Kasaï) et le Bandundu. Ainsi s’accomplit une œuvre divine, celle de sceller prophétiquement le lien d’un pays, le Congo de Simon Kimbangu, un et indivisible, à jamais lié par le Divin Créateur par le Calvaire du Prophète Simon Kimbangu, Prophète-saint-patron de la RDC.[39]
III. 2. La mort miraculeuse de Simon Kimbangu
Tout être humain, quels que soient sa race, son rang, sa richesse ou encore son caractère divin, est appelé à mourir. Ce principe divin est clairement repris dans Genèse 3 : 2 : « l’homme qui est poussière retournera à la poussière ».
Jésus-Christ lui-même, comme Simon Kimbangu, son Envoyé Spécial, n’ont pas échappé à cette règle : ils sont tous les deux morts. De même que la mort du Christ reste un mystère, celle de Kimbangu l’est également. Mystère d’abord, parce qu’il a précisé lui-même le jour et l’heure exacts de sa mort et ensuite, parce qu’après l’autopsie, on a remarqué qu’il ne possédait pas certains organes pourtant indispensables dans l’existence d’un être humain.
En effet, l’histoire nous renseigne qu’un certain jeudi 04 octobre 1951, alors que le prophète était dans sa cellule de prisonnier bien scellé, on le vit sortir miraculeusement de ladite cellule, et se tint devant l’entrée, enchaîné. Craignant qu’il ne s’échappe, le Directeur de prison ordonna à celui-ci de retourner dans sa cellule. Kimbangu refusa d’obéir à cet ordre et rétorqua qu’il n’y retournerait plus, car il était souffrant d’une dysenterie. A cause de cette maladie, la décision était prise de l’amener à l’Hôpital Général d’Elisabethville, rebaptisé de nos jours Hôpital général Sendwe, toujours enchaîné, malgré lui.
Quelques jours après, soit le jeudi 11 octobre 1951, à cause bien entendu de l’information liée à son hospitalisation et de la dégradation de son état sanitaire, deux prêtres catholiques et une sœur du nom d’Eudoxie, arrivèrent très tôt le matin à l’hôpital pour administrer à Kimbangu l’extrême onction telle que pratiquée chez les catholiques.
C’est au cours de leur descente à l’hôpital Général que Kimbangu exigea une réponse exacte à sa question avant qu’il ne puisse accepter qu’on applique sur lui l’extrême onction. Au fait, la question posée aux prêtres et à la sœur était que ceux-ci lui donnent le jour et l’heure exacts de sa mort. Incapables de répondre, ces derniers se retirèrent, et Kimbangu de dire aux prisonniers malades qui étaient avec lui à l’hôpital, qu’il mourra le vendredi 12 octobre 1951, à 15 heures précises. Ce qui arriva exactement le jour suivant, après s’être tapé à trois reprises ses côtes droites.
Très étonnant encore, avons-nous fait savoir, c’est que l’autopsie réalisée pour déterminer la vraie cause de sa mort, autopsie à laquelle un seul infirmier congolais du nom de Mowana avait pris part, a surpris et les médecins et le commun des mortels, car on ne trouva presque rien dans son ventre : il n’y avait pas d’entrailles et quelques organes dont les intestins, le poumon, le foie, etc.[40]
Le 25 mars 1960, neuf ans après sa mort, on procéda à l’exhumation de la dépouille mortelle de Simon Kimbangu. « Chose curieuse, en ce jour-là, le corps de cet homme de Dieu s’est retrouvé intact sans subir la décomposition, l’œil gauche fermé et l’œil droit ouvert ».[41]
IV. CONTRADICTIONS ET CONTESTATIONS
L’histoire du prophète Simon Kimbangu semble être teintée de beaucoup de contradictions liées aux interprétations de certains faits, conduisant ainsi à des vives contestations qui obligent les chercheurs à approfondir les investigations pour éclairer la lanterne de tous ceux qui ont soif de connaître la vérité.
Prenant le premier exemple, force est de faire remarquer que, si pour l’Eglise Kimbanguiste, le corps du prophète repose à Nkamba, une version contradictoire laisse entendre que la dépouille mortelle qui se trouve dans le mausolée à Nkamba n’est pas de Kimbangu, mais plutôt celle du corps d’un militaire Tetela, et que le vrai corps du prophète se trouverait soit en Belgique, soit à Kisantu chez les prêtres jésuites. Aussi, présenté comme appartenant à la tribu Ngombe, une autre version beaucoup plus répandue, et qui se confirme de plus en plus, fait savoir que Kimbangu serait issu de la tribu Ntandu et non Ngombe, précisément du clan Mbamba Kalunga, du village Ndembo Kimvanza, situé non loin de la Mission Kipaku, secteur de Ngufu, Groupement de Kitempa, dans le territoire de Madimba. En outre, il serait l’oncle à Tata Gonda, fondateur de l’Eglise Chrétienne par Union de Saint-Esprit (ECUSE), et qu’il n’avait pas non plus d’enfants.
En effet, pour cette dernière version, il se dégage de nos investigations que, Maman Muilu serait la femme à l’oncle du Prophète Simon Kimbangu, avec qui elle avait eu quatre enfants, dont l’aînée, une fille, s’appellerait Marie Nkitudia,[42] suivie de trois garçons qu’on considérerait abusivement par la suite, et en raison de la crédibilisation de l’Eglise, comme enfants biologiques du Prophète. Celui-ci aurait récupéré sa tante par union, en vue de l’aider à élever les enfants laissés par son oncle qui venait de mourir, et qui n’avaient personne d’autre pour les soutenir et non en tant que « sa femme ». Car, selon les mœurs kongo, c’est un sacrilège qu’un neveu épouse la femme laissée par son oncle. Deux faits semblent accréditer la version selon laquelle Kimbangu ne serait que « père nourricier ou adoptif » et non « biologique » des quatre enfants de Maman Muilu.
Le premier repose sur la question de savoir : Comment, Simon Kimbangu et Marie Muilu, qui se sont mariés le 04 juillet 1915, pouvaient-ils déjà avoir un enfant âgé d’une année et demi (Kisolokele Lukelo, né le 12 février 1914), alors que c’est seulement au cours de cette même année (1915) que Kimbangu prit comme épouse Marie Muilu Kiawanga Nzitani ? Kisolokele serait-il un enfant né hors mariage ? Le second va dans le même sens et trouble même gravement nos consciences. En effet, si l’oncle, père biologique, des quatre enfants de maman Muilu est mort en 1913, et que Kisolokele Lukelo, deuxième enfant de maman Muilu, est né le 12 février 1914, soit une année après la mort de l’oncle de Simon Kimbangu, c’est que le premier enfant de maman Muilu, appelée Marie Nkitudia, serait née vers 1912, c’est-à-dire du vivant de l’oncle de Simon Kimbangu ! Comment Simon Kimbangu pouvait-il devenir le père biologique de ce premier enfant née vers 1912, c’est-à-dire du vivant de son oncle ? Nous n’osons le penser un seul instant !
Ces incompatibilités ne confirment-elles pas la thèse que ces enfants ne sont pas réellement les siens ? Pire encore, les témoignages dont papa Diangienda était l’auteur sur son père, tels que celui faisant croire que quand il l’embrassait, ils ne se sentaient pas tous les deux être deux personnes distinctes car il (Diangienda) était, disait-il, la réincarnation de son père Kimbangu, réincarnation d’un vivant ? Ne sont-ils pas des mensonges, des dogmes visant à renforcer la foi des fidèles Kimbanguistes autour de sa personne ? Car, gosse qu’il était (3ans et demi), comment pouvait-il être capable de se souvenir des événements aussi époustouflants que splendides, alors qu’il n’avait pas eu le temps nécessaire d’évoluer et donc de grandir à côté de son père qui s’est pourtant séparé d’eux le 12 septembre 1921 à cause de son arrestation ?
Par ailleurs, il se dégage également de nos enquêtes que l’oncle à Simon Kimbangu était un excellent tireur du vin de palme, lequel vin faisait le bonheur des consommateurs, surtout des commerçants qui provenaient de la région où l’élevage des bovins était l’activité principale. D’où, l’appellation « Besi Ngombe ». Ces derniers venaient vendre leurs produits au marché de Nkandu, lequel marché se situait à l’endroit où se trouve actuellement érigé l’hôpital Saint Luc de Kisantu.
Contents donc de la qualité combien meilleure du vin que leur vendait ce dernier, ces commerçants exprimèrent le vœu d’inviter l’expert à venir s’installer dans l’ un de leurs villages, non seulement pour consolider davantage leurs liens, mais aussi voir celui-ci exercer le même travail chez eux, et former les jeunes de leur contrée dans ce domaine, la région comptant beaucoup de palmeraies naturelles.
Cette proposition plu à l’oncle de Kimbangu, qui décida finalement d’y aller, accompagné de son neveu Kimbangu. Trouvant que le terrain était propice, ils s’y établirent de manière durable, avant d’être rejoints quelques temps après par Maman Muilu et les enfants qui étaient restés dans leur village natal : Ndembo Kimvuanza. C’est là que peu après l’oncle trouvera la mort, obligeant ainsi Kimbangu à prendre la relève de son oncle, en aidant Maman Muilu, sa tante, par union avec son défunt oncle, dans ses charges on ne peut plus lourdes liées à la survie des enfants.
C’est aussi à Nkamba que le ministère prophétique de Kimbangu commença, permettant aux ressortissants de la contrée de récupérer malheureusement l’affaire à leur profit, déformant ainsi la vraie origine géographique du prophète.
Cette version des faits remet en question encore une fois de plus la confirmation selon laquelle Kimbangu est né à Nkamba, village qu’il n’a pourtant connu qu’accidentellement. Pire encore, l’Eglise Kimbanguiste n’est-elle pas en contradiction avec la bible, en considérant et publiant tout haut que papa Diangienda est « Yahvé », le « Dieu incréé», par qui tout existe, alors que la Bible souligne clairement que Dieu est esprit, et que personne ne l’a jamais vu, si ce n’est le Fils (Jean 6 :46, Jean 1 :18, Exode 33 :20, 1 Jean 4 :12), et que papa Dialungana est la réincarnation de Jésus-Christ dont on célèbre d’ailleurs la Noël le 25 mai par les fidèles kimbanguistes, et le 25 décembre par les autres chrétiens, alors que cette célébration n’est pas, comme cela est le cas avec la Pâque, une recommandation de la Bible ? (Luc 22 :19).
Comment peut-on également comprendre que l’actuel Chef Spirituel, papa Simon Kimbangu Kiangani, de vrai nom Jacob Kiula Kiangani, selon une source digne de foi, est à son tour, considéré comme le Saint–Esprit, alors qu’il n’a pas su garder l’unité de l’Église, créant ainsi des contestateurs qui se sont retirés pour se retrouver de nos jours du côté de Monkoto, refusant depuis près de deux décennies déjà de se réconcilier avec ses frères, afin de rétablir la prestigieuse union appelée « Bana 26 » ? Quel est donc ce « Saint-Esprit » qui règne là où la division a élu domicile ? Les contestations qui fusent de partout, notamment de certains pasteurs des Eglises dites de Réveil, qualifiant l’Eglise Kimbanguiste d’un conglomérat de sorciers où histoire créée de toutes pièces et bible s’entremêlent sans esprit critique, ne sont-elles pas justifiées ?
Aussi, n’a-t-on pas assisté, tout au début de la séparation de l’Eglise Kimbanguiste, séparation causée par la mise en application de ce qu’on a appelé jadis « la Résolution », à une guerre médiatique opposant les deux chaînes de télévisions kimbanguistes (RATELKI et RTK)[43], où le célèbre animateur Nkuvu Baka, de la RTK aile Monkoto, avait révélé, images à l’appui, tant de faussetés propagées malheureusement par la RATELKI sur l’actuel Chef Spirituel ?
A titre d’exemple, si les Kimbanguistes qui ont choisi de rester fidèles à papa Simon Kimbangu Kiangani soutiennent qu’il est né le même jour que mourait le prophète Simon Kimbangu, c’est-à-dire le 12 octobre 1951, et qu’il serait la réincarnation de celui-ci, car, semble-t-il, le prophète aurait promis qu’il naîtrait de nouveau le jour même de sa mort, les Kimbanguistes de Monkoto se sentent indignés et contredisent cette affirmation, en dénonçant la machination éhontée visant à sacraliser gratuitement celui-ci, qui est pourtant né le 11 Juin 1951, c’est-à-dire quatre mois et un jour avant la mort du prophète.
Par-dessus tout, la question que nous nous posons est celle de savoir : Si réellement papa Simon Kimbangu Kiangani est la réincarnation du prophète Simon Kimbangu, qui s’est lui-même déclaré être le Mvuluzi, c’est-à-dire le Sauveur de la race noire, comment celui-ci, à sa réincarnation, changerait-il de statut pour devenir Saint-Esprit, et que le statut de Sauveur passe à son fils Dialungana, considéré comme le Messie, lui qui est pourtant l’un des pères de l’actuel Chef Spirituel ? Jésus–Christ s’est-il reconnu être à la fois Sauveur et Saint Esprit ? A qui profite donc cet imbroglio humano-spirituel qui s’écarte largement de la doxologie, et qui s’enfonce davantage et de manière aveugle dans l’homéostasie, pétrie d’apostasie et d’hérésie ?
V. SIMON KIMBANGU: HEROS NATIONAL OU COMMUN DES MORTELS OUBLIE ?
Le contact Europe-Afrique marqua un tournant décisif dans l’histoire du continent noir. De l’esclavage qui existait déjà avant l’arrivée de l’homme blanc, les missionnaires, dont la mission était, faisait-on croire aux indigènes, l’évangélisation afin de sortir ces derniers de leur état de « sauvagerie », n’ont pas condamné ni combattu cette pratique au nom de l’amour du prochain, ils ont au contraire soutenu une autre pratique beaucoup plus rébarbative : la traite des Noirs.
A cet effet, Kabwita Kabolo Iko écrit : « Non seulement l’Eglise, jusqu’à Grégoire XVI, n’a pas interdit l’esclavage dans sa globalité, il existe de surcroît des esclaves dans les Etats catholiques, y compris les Etats pontificaux, jusqu’au XVIIIe, voire le début du XIXe siècle. On ne peut en conséquence s’étonner que dans un Kongo où la traite occupe, aussi bien pour des conquistadores que pour des pombeiros[44] chrétiens, une place de premier choix, les missionnaires aient possédé eux-aussi des esclaves dit « d’Eglise ».[45]
Le même auteur ajoute : « L’expérience d’esclavage d’Israël en Egypte (Ex.21 ; Lv. 25 ; Dt.25) n’est pas connue que des Juifs et des chrétiens. Jésus, lui-même consacré par l’esprit pour (…) libérer les opprimés, ne dénonce pas de manière explicite l’institution de l’esclavage. Il n’y a en tout cas pas un tel verset dans la Bible. En faisant dérouler le cours du temps par une relecture de l’histoire de la chrétienté, depuis les Apôtres, les Pères de l’Eglise, jusqu’aux papes du temps moderne en passant par la théologie médiévale, un constat reste irréfutable : l’asservissement de l’homme par l’homme qui a précédé l’existence du christianisme n’a pas été prohibé par lui. Le Nouveau Testament a plutôt exhorté les esclaves à la patience et à l’obéissance, les maîtres à la miséricorde et à la douceur (la lettre à Philémon est toujours évoquée à ce sujet, quand bien même elle va au-delà de la simple exhortation : elle contient en plus la formulation par Paul d’une suggestion libératrice, celle d’affranchir l’esclave Onésime que l’apôtre considère comme une partie de lui-même)…[46]
Au regard de ce qui précède, force est de souligner que, si la mission du Christ était de libérer les captifs en esprit, « la libération dans l’optique de Kimbangu est une action pratique, matérielle, essentiellement liée à la vie quotidienne de son peuple. Il s’agit de libérer l’homme noir du poids socio-économique et politique du fait de la domination et d’humiliation. L’homme, en effet, est à la recherche permanente de la Paix, de l’Unité, de l’Egalité, de l’Equité, de la Fraternité et de l’Harmonie. Les différentes révolutions sociales, politiques et religieuses témoignent d’une crise interne synonyme d’une profonde rupture d’équilibre entre l’homme et ses valeurs intrinsèques naturelles, divines.
Autant dire que l’esprit de liberté ne se laisse pas endormir éternellement. L’oppression suscite toujours chez l’opprimé sa propre négation. Il est donc permis de penser que Simon Kimbangu opte pour une démarche sociopolitique comme une idée morale, et sans doute un des moyens qui lui permit de surmonter les résistances auxquelles il se heurtait pour refaire la cohésion et l’équilibre sociaux. Car, au centre des vagues d’arrestation (37.000 familles déportées et 150.000 martyrs), des mouvements de grève, de désertion des lieux de travail et des attitudes de désobéissance multiforme, se trouve le discours de Simon Kimbangu. C’est lui qui a su incarner et exprimer les douleurs et les rêves d’un peuple opprimé. Et les indépendances politiques qui vont suivre son action confirment la pertinence et la justesse de ses ambitions ».[47]
Il est donc fort remarquable que la mission de Simon Kimbangu, comme d’ailleurs celle de Moïse pour les Juifs capturés en Egypte, des pères de l’indépendance de la RD Congo dont Nzeza Nlandu, Kasa-Vubu, Kingotolo, Lumumba, M’zée Laurent-Désiré Kabila…, se situe dans son combat contre les injustices entre les hommes de toutes formes pour rétablir l’harmonie entre Dieu et les hommes, libérer et réhabiliter l’homme noir.
Encore très jeune, il prophétisa sur ce qui l’attendait : « Ma personne physique sera soumise à l’humiliation et à la souffrance, mais ma personne spirituelle sera confrontée dans la lutte contre les injustices des peuples de ténèbres du monde qui sont venus nous coloniser. J’ai été envoyé pour libérer les peuples du Congo et de la race noire au monde ».[48]
Comme il l’avait prédit dans les années vingt, à l’âge de 34 ans, Kimbangu est arrêté et jeté en prison pour 30 ans, où il a enduré toutes les peines du monde, faisant preuve de longanimité, car le souhait des colons et des missionnaires était qu’il disparaisse. Comparativement à un autre homme de liberté, de paix et de développement, Nelson Mandela, qui avait le soutien de la communauté internationale, y compris de la presse du monde et qui, après 27 ans d’emprisonnement, il en sortit vivant et a même occupé par la suite le poste de Président de la République, avant d’être proclamé, après sa mort, héros national Sud-africain, prix Nobel de la paix, le symbole de liberté, à l’honneur de qui « Mandela day », décrétée par les Nations-Unies, est instituée et célébrée chaque le 18 Juillet, Kimbangu, lui, était abandonné à son triste sort par l’humanité toute entière, aucune presse ne faisant allusion à son cas, jusqu’à ce qu’il meurt en prison, loin de sa famille, qu’il n’a jamais revue.
L’assassinat déguisé de Simon Kimbangu pour l’amour de son pays, de son peuple en particulier et de l’homme noir en général, n’a jamais été valorisé par les autorités congolaises. Il devrait normalement être considéré comme le tout premier héros national Congolais.
Pour vérifier si Kimbangu mérite d’être élevé au rang de héros national, il nous paraît impérieux de dresser un tableau d’attributs d’un héros en ordonnée. A chaque attribut, il sera affecté une pondération, qui est le fruit d’un échange entre plusieurs personnes, dont la somme totale pour tous les attributs sera égale à 100. Ce tableau reprendra les noms de quelques héros reconnus mondialement, y compris celui de Kimbangu, en abscisse, mais en haut. Le produit des pourcentages qu’aura Simon Kimbangu, permettra d’affirmer ou d’infirmer si celui-ci mérite, oui ou non, d’être élevé à ce rang. Retenons que le minimum de points requis pour être reconnu héros est de 50%.

Au regard des pourcentages obtenus par chacune des personnes répertoriées dans ce tableau, force est de constater que Simon Kimbangu a rempli tous les critères d’un héros, soit 100%, alors que l’un des héros nationaux congolais proclamés, à savoir P. E. Lumumba, n’a pas totalisé le pourcentage exigé pour être élevé à ce rang, de même que LD. Kabila qui n’a réuni que 55%, et qui, pourtant, a mérité d’être élevé au rang de héros.
Comparativement donc à l’action menée par Simon Kimbangu et à celles menées par Lumumba et Laurent-Désiré Kabila, force est de dire que Kimbangu est un héros national oublié de bon gré, d’une part, et qu’il mérite cette reconnaissance non seulement dans son propre pays, mais aussi en Afrique noire en général, d’autre part.
Patrimoine
africain, les dirigeants politiques congolais sont appelés d’agir dans le sens
d’élever ce grand homme de Dieu au rang de Héros, afin d’inciter les autres
nations à reconnaître, elles aussi, sa lutte menée dans leur libération, car
Kimbangu est le prototype des héros nationaux africains. C’est de cette façon
que la RD Congo encouragera d’autres filles et fils du pays à s’engager dans la
défense de l’intérêt national, sachant que l’histoire retiendra et publiera
tout haut leur mérite.
VI. BOUDDHISME ET KIMBANGUISME SOURCE D’INSPIRATION ET DE PUISSANCE ?
Contrairement à l’hindouisme, auquel on ne connaît pas de fondateur, le bouddhisme en a eu un, né en Inde au milieu du VIème siècle av. J-C, aux confins de l’actuel Népal. C’était un prince qui, à l’âge adulte, devint un ascète errant, tourmenté par le problème de la souffrance et de la mort. Un jour, il eut une illumination qu’il appela son « éveil » et à la suite de laquelle il prit le nom de Bouddha, c’est-à-dire l’ « Eveillé ».[49]
Dès son premier sermon dans un bois près de Bénarès, il accueillit des disciples et forma avec eux une communauté monastique qui gagna beaucoup d’adeptes. Il a présenté sa doctrine comme la « voie de la délivrance », une méthode pour se libérer des passions et de la douleur.[50]
Partant de la croyance hindoue selon laquelle la mort est toujours suivie d’une renaissance, il prêche la nécessité de briser cette chaîne sans fin des naissances, décès et réincarnation pour arriver au nirvana, qui est la béatitude absolue sans désir, donc sans souffrance.[51]
Après s’y être largement propagé, le bouddhisme a disparu de l’Inde vers le Xème siècle. Il est actuellement très répandu au Sri Lanka et en Thaïlande, où il est religion d’Etat, en Chine, au Tibet, au Viet Nam, au Cambodge et surtout au Japon, où il est venu de Corée en 538 et où il a pris des formes originales, notamment celles du culte d’Amida (Bouddha de la compassion connu dans le mahayana indien sous le nom d’Amitabha)et du zen, école dérivée d’une forme du bouddhisme dénommée Chan Chinois et dans laquelle prévaut une méthode particulière de méditation. Au Tibet, le bouddhisme a aussi sa coloration particulière avec le tantrisme et le lamaïsme, dont le chef, spirituel et temporel, est le dalaï-lama.[52]
Au vu de tout ce qui précède, un élément important à soulever est que, dans tous les pays où le bouddhisme est appliqué comme religion d’Etat ou comme principale religion, cette religion constitue une source d’inspiration et de puissance intarissable, permettant à ces pays de connaître un essor dans différents domaines, classant ainsi ces pays dans le rang des pays développés (Japon) et émergents (Chine, Thaïlande, etc.).
Abordant le cas du Kimbanguisme, il est fort intéressant de reprendre ici les impressions du Révérend Dr. Konrad Raiser, Secrétaire du COE, impressions livrées le 08 juillet 1999 à Nkamba, pour se rendre compte de ce que le Kimbanguisme constitue comme source d’inspiration et de puissance :
« C’est un chemin de pèlerinage qui mène au centre spirituel du Kimbanguisme pour retrouver la source de ses origines et toute la force de sa spiritualité qui, du reste, a beaucoup influencé le réveil en Afrique. J’ai ressenti l’esprit des béatitudes, l’esprit des huit félicités annoncées par Christ, bonheur absolu de l’humanité et de paix. J’ai été impressionné par la simplicité et l’authenticité de la spiritualité Kimbanguiste. Je crois que c’est de là que vient cette source de l’énergie qui peut transformer non seulement le peuple Congolais et ceux de la région des grands lacs, mais aussi tous ceux qui peuplent l’Afrique. Dès lors je pars d’ici avec le ferme espoir de voir resurgir en force un réveil spirituel qui devra embrasser tout le continent africain ».[53]
Malheureusement,
le Kimbanguisme est observé avec beaucoup de réserve, de répugnance, voire de
mépris par les hommes politiques congolais, et
une bonne partie de la population congolaise, qui ignorent que par le
fait que son fondateur, Simon Kimbangu a apporté un bouleversement positif dans
la vie sociale, de même il reste une source d’inspiration et de puissance dans
ce monde en détresse et en voie de déchristianisation, si seulement si les
Africains en général, et les Congolais en particulier, reconnaissent Kimbangu
et mettent en pratique ses enseignements et ses recommandations.
CONCLUSION
En faisant dérouler le cours du temps par une relecture de l’histoire, l’on est frappé de constater qu’à chaque fois qu’un peuple donné se trouve dans une situation difficile liée à la domination, Dieu suscite toujours un « sauveur » pour le délivrer, et le conduire vers sa vraie destinée.
Les peuples d’Afrique noire en général, et ceux de la RD Congo en particulier, ont traversé, comme d’ailleurs d’autres peuples du monde, des moments difficiles de leur histoire, qu’un homme s’est levé pour dire non à l’oppresseur et, a amené l’homme noir à la liberté tous azimuts. Cet homme est le prophète Simon Kimbangu, né en République Démocratique du Congo en 1887, dans un petit village du Kongo Central : Nkamba.
Chrétien baptisé à la Baptist Missionnary Society (BMS), Kimbangu devint un fervent chrétien et catéchiste dévoué. Quelques temps après, Kimbangu eut, de la part du Christ, et au regard des injustices perpétrées par la colonisation belge contre des autochtones, la mission de combattre ces vices et donc de libérer l’homme noir des abus du système colonial belge. Cette mission menée avec brio, lui valut la chasse à l’homme de la part des colons et des missionnaires, qui l’ont finalement arrêté et jeté en prison, où il mourut 30 ans après, loin de sa famille qu’il n’a plus revue, et à la grande indifférence de la communauté et de la presse internationales.
Comme on peut le confirmer sans crainte d’être contredit, et à la lumière des pourcentages obtenus par rapport aux critères retenus, Kimbangu est le tout premier Congolais à remplir tous les critères d’un héros national. Il est étonnant et injuste que ceux qui ont emboité le pas à sa démarche, à savoir P.E. Lumumba et LD. Kabila, soient proclamés des héros nationaux, alors que leurs combats nous ont laissé tant d’autres problèmes insolubles, devant lesquels la RD Congo n’arrive pas, jusqu’à ce jour, d’en sortir.
Au vu de ce qui précède, il y a lieu de croire que l’attitude indifférente de l’homme politique Congolais vis-à-vis de la lutte menée par Kimbangu, semble être une complicité criante ex poste avec les colonisateurs, qui mérite d’être dénoncée. En effet, elle laisse entrevoir comment l’histoire de ce grand homme de Dieu, qui mérite d’être élevé au rang de héros national, lui qui a payé de sa vie, pas pour briguer un poste politique quelconque, mais pour libérer simplement ses frères de race, est jetée dans les oubliettes.
A vrai dire, Simon Kimbangu est pris par l’homme politique Congolais comme un citoyen ordinaire, mieux comme un commun des mortels, qui ne mérite pas jusque-là une attention très particulière. Cela se confirme par le fait que, comparativement à François Luambo Makiadi, musicien Congolais, qui jouait de la musique pour sa survie et celle de sa progéniture, s’est vu érigé un monument à la Place des Artistes au Rond-point Victoire, alors que Kimbangu, qui a accepté de braver la puissance coloniale pour son pays, n’en a pas.
Luambo Makiadi mérite-t-il mieux que Kimbangu ? « Un prophète n’est sans honneur que dans sa patrie, parmi ses parents et dans sa maison », cette déclaration de Jésus-Christ, reprise dans Marc 6 : 4, est une vérité évidente qui se justifie pleinement dans le cas de Kimbangu. Aussi, n’a-t-on pas vu, lors des assises de la Conférence Nationale Souveraine (CNS), les Conférenciers huer sur papa Diangienda Kuntima, un des trois fils du prophète, quand celui-ci fit savoir, à travers son intervention, qui le laissa dans un état d’aposiopèse, que rien ne marcherait en Afrique noire en général, et au Zaïre en particulier, si on ne reconnaissait pas son père pour tout ce qu’il a fait ?
A cet effet, le prophète Simon Kimbangu n’a-t-il pas raison de dire que, « tous les gouvernants de l’Afrique libérée, sous conseil des Blancs, travailleront pour les Blancs (…),[54] et que par le fait que ces Blancs ont tout fait pour étouffer et camoufler l’œuvre de Kimbangu, leurs complices, c’est-à-dire les dirigeants politiques congolais notamment, ne feront pas pérenniser cette tragédie ?
Il est donc temps pour les dirigeants africains en général, et congolais en particulier, de faire une réflexion profonde sur la déclaration à laquelle nous avons déjà fait allusion, déclaration faite par le Souverain pontife, le Pape Jean Paul II, qui stipule : « Le Christ lui-même est africain, et Dieu est noir… ».[55]
Cette déclaration était-elle hasardeuse ? Si l’attribut ‘‘Africain’’ est attribué à Christ, et que celui de ‘‘Dieu’’ à un Noir, comment et pourquoi les dirigeants politiques congolais, à l’opposé de Jean-Paul II, hésitent-ils à proclamer officiellement le prophète Simon Kimbangu comme le grand Héros congolais et africain, alors que cette reconnaissance ne va pas, d’autant plus qu’il le mérite, bouleverser la conscience de l’Humanité comme cela fut certes le cas avec la déclaration du Saint Père qui, en réalité, a remis en cause les prescrits bibliques, reconnaissant à Jésus-Christ l’appartenance à la tribu juive et à Dieu le caractère d’esprit, d’invisibilité, que personne n’a jamais vu pour déterminer sa couleur.
N’est-il pas alors vrai que si l’Afrique noire en général, et la RD Congo en particulier pataugent, confirme une pensée kimbanguiste, c’est à cause du fait que les politiques refusent de reconnaître Kimbangu comme la voie de sortie à leur situation misérable ? Et que la non application de ses enseignements et recommandations ne ferait que retarder le développement de cette partie de l’Afrique, contrairement aux Bouddhistes qui, à travers l’application stricte des lois et principes tels qu’enseignés par Bouddha, sont parvenus à développer leurs pays, le Bouddhisme étant une source d’inspiration et de puissance ?
Justifiant cette affirmation, voyons dans les lignes qui suivent, comment Jean-Marie Van Impe, curé d’une paroisse catholique à Bruxelles, manifesta sa colère devant un des responsables Kimbanguistes et le concierge de ladite paroisse, à l’issue de la cérémonie de mariage de maman Kamampasiko, tenue le 27 février 1997, cérémonie qui s’est soldée par la violence, le vandalisme et la profanation orchestrés par un groupe de fidèles Kimbanguistes :
«…Avec ce que vous avez fait là, vous ne pouvez pas vous revendiquer de Kimbangu. On voit bien que vous ne le connaissez pas. Kimbangu était un non violent ; nous l’avons bien connu puisque nous l’avons suivi depuis 1921 jusqu’à sa mort. Nous avons beaucoup de documents sur lui. Vous savez, il était jeune et beau, il portait un ruban blanc autour de sa tête. On a des photos de lui ».
« Tant que vous allez le méconnaître, sachez-le que l’Afrique ne s’en sortira pas. Ce n’est pas un homme ordinaire, c’est un Envoyé Divin qui est venu spécialement pour sauver votre race. Le Kimbanguisme n’est pas une petite religion. C’est une des grandes religions du monde qui s’inscrit dans le grand courant dépensée. C’est une religion au même titre que l’Islam, le Judaïsme et le Bouddhisme. Cette bible que vous lisez n’est pas la vôtre ; vous venez nous apprendre le Christianisme, mais c’est nous qui vous l’avons apporté ; nous voulons apprendre le Kimbanguisme ».
« …Le monde vous attend. Vous devez connaître votre histoire. Regardez-nous ! Pourquoi nous nous opposons à la publication des manuscrits de la mère morte sur les Esséniens ? Eh bien, parce que le jour que cela sera publié, il s’en sera fini du Christianisme. Nous repartirons tous vers le judaïsme. Vous êtes la clé de l’Afrique ; elle ne pourra pas se développer si vous vous écartez de Simon (Mfumu) Kimbangu ».
Il est donc temps de souligner que, l’Afrique n’a plus besoin d’une « Eglise Kimbanguiste », entendue ici comme une société religieuse fondée par Jésus-Christ, mais plutôt d’une religion kimbanguiste pure, source d’inspiration et de puissance, au centre de laquelle se trouverait le Mvuluzi Kimbangu, libérateur et conducteur de la race noire vers sa vraie destinée. Le christianisme dans lequel le Kimbanguisme est allé s’engouffrer étant en perte de vitesse, car, a déclaré le Pape François, dans une de ses audiences publiques, « la Bible est un beau livre saint, mais comme toutes les grandes et anciennes œuvres, certains passages ne sont pas à jour. Certains appellent même à l’intolérance ou au jugement. Le temps est venu pour voir ces versets comme des interpolations plus tard, contrairement au message d’amour et de vérité, qui rayonne autrement par l’Ecriture, et que l’enfer n’existe pas, Adam et Eve ne sont pas non plus réels ».
Au regard donc de ce qui précède, et en déclarant que « les vrais Kimbanguistes sont en dehors de l’Eglise », papa Diangienda ne manquait-il pas de courage de dénoncer qu’il avait été induit en erreur en acceptant, afin d’arracher l’autorisation d’ouverture auprès de l’administration coloniale belge, la dénomination « Eglise de Jésus-Christ sur la terre par son Envoyé Spécial Simon Kimbangu ? »
En définitive, et comme l’a si bien laissé entendre Nicolas Sarkozy, «…Le défi de l’Afrique, c’est d’entrer davantage dans l’Histoire. C’est de puiser en elle l’énergie, la force, la volonté d’écouter et d’épouser sa propre histoire », car, « tout peuple coupé de son Génie Superviseur, de ses ancêtres, de sa Langue ancestrale, de sa Tradition, de son Passé, et du Dieu de ses ancêtres, est semblable à un Arbre déraciné. Tôt ou tard, ce peuple fanera et sombrera dans le vide qui facilite toutes les dominations », défi dont nous espérons voir les dirigeants politiques Congolais relever et cela dans un futur proche.
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2007.
[1] MWENE B.G., « Parcours politique et discours religieux. Un Prométhée noir : Simon Kimbangu », in Simon Kimbangu. Le Prophète de la libération de l’Homme noir, tome I, éd. L’Harmattan RDC, 2014, p. 87.
[2] MENGI K., « Les implications coloniales dans l’émergence du Kimbanguisme », in Actes de la Conférence Internationale sur Simon Kimbangu, l’Envoyé Spécial de notre Seigneur Jésus-Christ, du 12 au 15 février 2006 à Kinshasa, éd. E. KI, 2006, p. 216.
[3] Pour calculer le nombre total de coups de fouet reçus par Simon Kimbangu durant tout le temps de son incarcération, nous avons pris le nombre de coups reçus par jour, soit 120, multiplié par le nombre de jours de l’année, soit 365 jours. Le produit de cette opération est à son tour multiplié par le nombre d’années passées en prison, soit 30 ans.
[4] « Mvuluzi » est une expression kongo qui signifie Sauveur. Cette expression amène, à juste titre d’ailleurs, les Kimbanguistes authentiques à soutenir que Kimbangu, qu’ils appellent affectueusement « Mfumu », Grand Chef, et pour qui ils disent qu’il n’était pas chrétien, n’est pas simplement prophète, car le ministère prophétique est l’un des attributs du Sauveur capable, comme c’est le cas avec Jésus-Christ, de tout : résurrection des morts, guérison de toutes sortes de maladies ou d’infirmités, délivrance des captifs…
[5] MABASI K.F.B., « Techno-science, recherche-développement et vie politique », in Politique et Morale, Enjeux et stratégies pour une Afrique nouvelle, USAKIN, Kinshasa, 2011, pp. 73-74.
[6] HEGEL, Leçons sur l’histoire de la philosophie I, Tome I, Introduction : Système et histoire de la philosophie, éd. Gallimard, Coll. Folio/Essais, Paris, p. 39.
[7] BUAKASA T.K.M., « Les sciences de l’homme. Approche de deux problèmes », dans La Philosophie africaine, Actes de la 1ère Semaine Philosophique de Kinshasa, Faculté de Théologie Catholique, Kinshasa, 1977, p. 90.
[8] « Quelles leçons tirons-nous du passé ? », dans Réveillez-vous !, Brochure des Témoins de Jéhovah du 08 août 2002, p. 3.
[9] KAMBAYI B., « Questions approfondies de la critique historique appliquées à l’histoire de l’Afrique », Séminaire de DEA, UPN, 2014.
[10] IDIMA K.D.N., « Joseph Kasa-Vubu héros national : Mythe ou réalité de 1915 à 1965 », TFC en Histoire, IPN, février 2005, p. 13.
[11] Ibidem, p. 15.
[12]Encyclopédia universalis, p. 373.
[13] HARMAND L., Histoire des origines au Xème siècle, éd. Hatier, Paris, 1969, pp. 122-123.
[14] DIANGIENDA K., Histoire du Kimbanguisme, éd. Kimbanguiste, Kinshasa, 1984, p. 17.
[15] NZAKIMWENA M., « Identité et Mission de Papa Simon Kimbangu », in Actes de la Conférence Internationale sur Simon Kimbangu, l’Envoyé Spécial de notre Seigneur Jésus-Christ, du 12 au 15 février 2006, éd. E.KI, Kinshasa, 2006, p. 67.
[16]Ibidem, p. 67.
[17] ZIDI J., « L’identité de papa Simon Kimbangu et l’émergence du kimbanguisme », in Actes de la Conférence Internationale sur Simon Kimbangu, … p. 92.
[18] ALIPANAZANGA F., « Papa Simon Kimbangu et l’homme noir », in Actes de la Conférence Internationale sur Simon Kimbangu, …, pp. 176-177.
[19] MARTIN M.I, Simon Kimbangu, un Prophète et son Eglise, éd. Du Soc, Lausanne, 1981, p. 61.
[20] DIANGIENDA K., Op. cit.,p. 29.
[21] BEMBO D.F., « La responsabilité des leaders politiques congolais dans la crise de 1960 à 1965 », Mémoire de Licence en Sciences Historiques, IPN, 2003, p. 92.
[22] ALIPANAZANGA F., Art. cit., p. 166.
[23] KABWITA K.I., Le royaume Kongo et la mission catholique 1750-1838. Du déclin à l’extinction, Mémoire d’Eglises, Karthala, Paris, 2004, p. 148.
[24] Lire à ce sujet Jean 3 : 36 : « Celui qui croit au Fils a la vie éternelle ; celui qui ne croît pas au Fils ne verra point la vie, mais la colère de Dieu demeure sur lui. Jean 14 : 6 : « Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi ».
[25] En réalité, et conformément à la volonté divine telle que décrite dans le livre de Genèse 15 :13, la punition du peuple Hébreux en Egypte ne devrait durer que quatre cents ans. Mais à cause de la dureté du cœur de Pharaon, 30 ans s’ajoutèrent à leur peine. Ce qui justifie aussi le retard que connaît l’Afrique dans sa libération effective, sa dette spirituelle ayant déjà pris fin en 1921.
[26] Pour comprendre que cette affirmation est vraie, c’est-à-dire que la dette spirituelle de 430 ans venait d’arriver effectivement à leur terme, nous avons effectué l’opération suivante : 1921-1491. Le produit de cette opération donne 430.
[27] MABIKA K., La remise en question, base de la décolonisation mentale, Remarques Africaines, 1965, p. 184.
[28] MOTERE Y.M., « Message et actes de puissance de Papa Simon Kimbangu », in Actes de la Conférence Internationale sur Simon Kimbangu, … p. 237.
[29] Ibidem, p. 237.
[30] ELIKIA M., Résistance et messianismes, Agence de Coopération Culturelle et Technique, Paris, 1977, p. 81.
[31] MOTERE Y. M., Art. cit., p. 243.
[32] Ibidem, p. 247.
[33] Ibidem.
[34] Ibidem, p. 248.
[35] MENGI K., Art. cit., p. 222.
[36] « Voyage du Pape, L’appel historique en faveur du Sahel », dans Jeune Afrique économie, n° 135, septembre 1990, p. 35.
[37] MENGI K., Art. cit., p. 217.
[38] KIKAMA N.B., « Historique de l’Eglise spirituelle des Noirs en Afrique. Cas de celle de Kinshasa », Mémoire de Licence en Sciences Historiques, IPN, 2001, p. 61.
[39] BONGELI Y.A.E., « Simon Kimbangu et la construction de la nation congolaise : Pour une lecture mythologique et superstitieuse », in Simon Kimbangu. Le Prophète de la libération de l’Homme noir, Tome I, éd. L’Harmattan RDC, Kinshasa, 2014, p. 100.
[40] Jusqu’à ce jour, aucun chercheur n’est capable d’expliquer avec précision pourquoi le Prophète Simon Kimbangu avait fait disparaître ces organes. La seule explication qu’on donne c’est que ces organes avaient disparu quelques minutes avant sa mort, précisément quand il s’était frappé à trois reprises ses côtes.
[41] MOTERE Y.M., Art. cit., p. 249.
[42] Marie Nkitudia serait née, selon les témoignages, avec une déformation physique hors pair, caractérisée par une morphologie indescriptible, mêlée à la présence massive de longues dents dans sa bouche, donnant ainsi l’image d’une très vieille femme qui faisait peur à voir. Elle aurait en outre atteint, trois jours après sa naissance, la taille d’une fillette de six ans, prononçant même quelques mots, avant de rendre l’âme le même troisième jour.
[43] RATELKI et RTK sont deux sigles qui ne veulent rien signifier que Radios-Télévisions Kimbanguistes. La première émet pour le compte de la plus grande communauté qui est restée fidèle à l’actuel Chef Spirituel, tandis que la deuxième émet pour le compte des Kimbanguistes qui se sont réfugiés à Monkoto.
[44] Les conquistadores sont des colons conquérants, tandis que les pombeiros sont des Blancs ou métis portugais, marchands d’esclaves Kongo.
[45] KABWITA K.I., Op. cit., p. 142.
[46]Ibidem, p. 141.
[47] ZIDI J., Art. cit., pp. 103-104.
[48] NZUZI N., La vie et l’œuvre de Simon Kimbangu, éd. Kongo Dia Ntotila, Kinshasa, SD, p. 18.
[49] LAROUSSE, Les concours administratifs, catégories B et C, éd. Larousse, Paris, 1994, p. 223.
[50] Ibidem.
[51] Ibidem.
[52] Ibidem.
[53] KAYOMBO S., Le soleil apparaîtra. Réflexion, vol.1, éd. Kimbanguiste, Kinshasa, SD, pp. 7-9.
[54] NZUZI N., Op.cit., p.19.
[55] VOYAGE DU PAPE …, Art. cit., p.35.