John KASUKU MIHALI
(Professeur d’universités et Ancien coordonnateur du Comité exécutif du mécanisme national de suivi et de supervision de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba)
RESUME
La radicalisation peut mener à la violence extrême, mais aussi, d’autres formes, comme on la présente dans la présente réflexion sur les quelques organisations prises en guise d’échantillon.
Cette analyse réfléchit sur la meilleure façon de renforcer l’apport décisif de l’éducation dans la lutte contre le radicalisation en Afrique centrale à travers l’émergence et la transnationalisation des mouvements terroristes.
A cet effet, la politique de prévention de la radicalisation doit mobiliser tous les acteurs de la sous-région d’Afrique centrale pour intervenir le plus en amont possible et interrompre le processus d’engagement dans la radicalisation violente. D’où la nécessite de la mise en place d’un mécanisme éducationnel contre la radicalisation violente et les filières terroristes en émergence dans la sous-région.
Mots-clés : radicalisation, Afrique centrale, éducation, terrorisme
INTRODUCTION
Au cours des dernières décennies, on a assisté à une augmentation d’actes terroristes dans le monde entier. Ainsi, d’importantes ressources sont utilisées par les Etats pour lutter contre le terrorisme. Si plusieurs approches sont utilisées par des services spécialisés des Etats, chacun selon son entendement du terrorisme et le degré de la menace à sa sécurité intérieure ou extérieure, nous pensons qu’une approche axée sur la prévention de la radicalisation à travers l’éducation serait beaucoup plus efficace que les différentes stratégies de lutte ou d’atténuation des effets du terrorisme.
Il existe une reconnaissance internationale de l’importance de l’éducation en tant qu’outil de prévention du terrorisme. Cependant, de nombreux problèmes et questions restent insuffisamment explorés. Par exemple, qu’est-ce qui pousse les jeunes à se radicaliser ? Quelles sont les politiques ou pédagogies de prévention du terrorisme qui existent et comment peuvent-elles être évaluées ? Quel est le rôle des enseignants dans la prévention de la radicalisation des jeunes ? Comment les différentes parties prenantes sont-elles impliquées dans les programmes de prévention et quel devrait être leur rôle ? Quels exemples de bonnes et de mauvaises pratiques avons-nous jusqu’ici ? En quoi la prévention par l’éducation diffère-t-elle en ce qui concerne les différentes formes de terrorisme, qu’il s’agisse de l’extrémisme de droite, de gauche, religieux ou traditionaliste ? Quel lien existe-t-il entre la prévention de l’extrémisme violent par l’éducation, l’éducation à la citoyenneté, l’éducation à la paix et l’éducation pour le développement durable ?
Avant de répondre à ces questions, il est prudent de chercher à comprendre le terrorisme en ce qu’il est ou pourrait être en tant que fait social plutôt qu’à se focaliser sur sa manifestation à la fois violente et terrorisante ainsi que sur ses effets désastreux. Il va sans dire que la grille de lecture axiologique de cette réalité sociale comporte l’inconvénient de faire obstruction à l’intelligibilisation de la substance du terrorisme. Pourtant, il est impérieux de saisir ce qui détermine le terrorisme. Ce, quoiqu’il soit communément perçu d’une manière y faisant peser une charge négative.
La recherche scientifique est donc face au défi d’objectivation du terrorisme, en dépit de limites inhérentes aux sciences sociales et humaines de marquer distinctement la rupture de tout lien d’adhésion du chercheur à l’égard de l’objet d’étude. En effet, le plus important n’est point de définir le terrorisme mais plutôt d’en comprendre suffisamment les contours et la nature afin de réussir à en contrer la menace. C’est dans cette perspective qu’il convient de questionner l’apport de l’éducation dans la lutte engagée ci et là contre le terrorisme.
A cet effet, nous devons tout d’abord questionner le fond que renferme le terme « terrorisme » dont les Etats peinent ou refusent à élaborer une définition à portée à la fois générale et universelle. Ensuite, nous devons présenter un cas empirique qui constitue une menace susceptible de s’avérer terroriste. Enfin, il nous faut nous appesantir sur la portée et les limites de l’éducation dans la prévention et la lutte contre le terrorisme.
I. CIRCONSCRIPTION CONCEPTUELLE DU « TERRORISME »
I. 1. Esquisses notionnelles du « terrorisme »
Il est d’autant plus ardu d’avoir une définition universellement consacrée du terrorisme qu’il s’agit d’un fait historique dont la compréhension requiert de prendre en ligne de compte les différentes expériences qui s’y rapportent suivant les espaces et les temps. Ceci permet de prendre la mesure de la variabilité conceptuelle du terrorisme.
Dès lors, il est compréhensible, comme le fait remarquer Janine Krieber, que « Depuis le début des études sur le terrorisme, la question de la définition a été un terrain de disputes académiques. A une certaine époque, aucun ouvrage sur le terrorisme ne pouvait se priver d’un chapitre introductif discutant interminablement de définitions, donnant l’impression de toujours monter la même montagne derrière un gigantesque rocher. Tant et si bien qu’au début des années 2000, les spécialistes ont semblé tout simplement laisser tomber cette quête et passer au discours plus productif d’analyse du phénomène lui-même ».[1]
Le terrorisme a une longue histoire, mais le mot a été inventé pendant la révolution française. Les attentats perpétrés par les terroristes d’Al-Qaïda contre les États-Unis le 11 septembre 2001 ont propulsé le terrorisme au sommet de la liste des menaces qui pèsent sur le monde. Le concept de terrorisme est notoirement difficile à définir. Les gouvernements, les universitaires, les journalistes et les agents de la sécurité donnent des définitions adaptées à leur perception du terrorisme. Martin Shaw soutient que le terrorisme est à la fois un instrument de résistance violente contre l’État et un instrument utilisé par les États.[2]
Il va sans dire que le concept de terrorisme renfermerait une réalité sociale d’une complexité telle que plusieurs approches académiques sont mises à contribution sans, cependant, parvenir à en absorber véritablement le sens ni les marques. Car la singularité de ces approches ne donne pas, encore, lieu à une combinaison grâce à laquelle, il serait envisageable de prendre en charge ce phénomène social dans sa totalité et sa globalité. Il est dès lors difficile d’admettre la généralisation d’une définition du terrorisme.
Les difficultés à formuler une définition universellement acceptée résident dans les différents types et attributs de groupes terroristes dans le monde. Ces groupes ont des motivations différentes et emploient des tactiques et des modes de fonctionnement différents, d’où le défi de les classer sous une même étiquette.
Malgré les difficultés à formuler une définition universellement acceptée du terrorisme, trois éléments sont systématiquement présents dans les définitions proposées. Ce sont l’usage de la violence ; la violence visant à déclencher un changement politique ; et la violence destinée à toucher un public plus large que sa cible immédiate.
Fort de ce constat, dans une étude consacrée à l’approche juridique du terrorisme, Ludovic Hennebel et Gregory Lewkowicz affirment remarquer que « la perspective juridique elle-même, pourtant particulièrement attentive et rigoureuse par rapport aux questions de définition, ne fait pas exception. La doctrine met en effet traditionnellement en exergue l’impossibilité, ou à tout le moins les difficultés considérables, qui pèsent sur les tentatives de trouver une définition universelle légale du terrorisme ».[3] Dès lors, la tendance à l’internationale consiste à privilégier les conceptions sectorielles du terrorisme tout en laissant libre court à chaque pays de développer son entendement de ce fait social auquel aucune entité étatique n’est exemptée en ce 21ème siècle.
Dans un élan de saisie du fond du terrorisme, Janine Krieber avance que ce phénomène relève d’« un mode de relation sociale qui implique l’utilisation de la violence ou de la menace de violence. Comme la plupart des autres relations sociales, le terrorisme est le résultat du comportement d’acteurs qui appliquent des stratégies d’action sur l’environnement humain et physique. »[4] Il revient à dire qu’étudier le terrorisme implique avant tout de prendre intellectuellement en charge la relation sociale qu’il y a entre les acteurs en présence (commanditaire et/ou auteur, victime et/ou cible) dont les effets interactionnels suscitent des dispositions psychologiques à la base d’un agir social marqué par l’usage de la violence plongeant dans la terreur.
Si la commission d’un acte terroriste ne bénéficie généralement point d’une sanction positive à cause de ses effets épouvantables dans la société humaine, le fait à la base de cet agir répréhensible peut relever des motivations susceptibles d’en faire valoir des circonstances atténuantes ou aggravantes. Il importe toutefois de le savoir et d’en saisir les contours non pas, d’abord, pour juger l’acte commis, mais plutôt, pour en comprendre le sens et, éventuellement, envisager des moyens d’une lutte efficace.
L’ambigüité du terme « terrorisme » pourrait découler du fait qu’il désigne en même temps une technique de combat, un type d’action politique violente, et un jugement moral.[5] Dans tous les cas, le terrorisme traduit couramment l’existence d’un conflit, probablement resté en état latent, sans pour autant que toutes les parties prenantes en soient (ou en eurent été) suffisamment et simultanément conscientes au même degré. C’est donc un révélateur du niveau de cohésion de la société (ou des sociétés) à laquelle (auxquelles) s’identifient les parties prenantes.
De la sorte, le terrorisme pourrait découler de plusieurs facteurs. Il s’agit notamment de l’injustice sociale ou de cette perception à tort ou à raison. Les frustrations de l’une des parties, son incapacité ou son refus de s’adapter à un mode de vie sociale considéré ou imposé, suivant le rapport de force en présence, comme standard au sein d’un espace et auquel il faille se conformer pour accéder à un certain « mieux-être ».
Ninon Grange note à ce sujet que « c’est une constante du terrorisme en général qu’il soit conçu par ses auteurs comme le fruit ultime d’une relation insupportable entre oppresseurs et opprimés (riches et pauvres, bourgeois et prolétaires, colons et colonisés, empires et tiers-monde…), c’est-à-dire d’un ordre injuste ».[6] La complicité des citoyens des Etats occidentaux dans la commission des actes terroristes sur les territoires de ces derniers peut, à ce titre, traduire une certaine « solidarité » avec les populations considérées, à juste titre, ou faussement comme des victimes des politiques d’asservissement et/ou leur opposition à ces politiques.
L’inhérence du conflit à la vie tant humaine que sociale fait du terrorisme une réalité intrinsèque à toutes les sociétés humaines, chacune le considérant au regard des éléments culturels, politiques, économiques, … qui la caractérisent non de façon statique, et en confèrent la signification. Mais, le conflit social, quel que soit le niveau élevé de retenue des membres d’une société humaine, n’échappe pas toujours à la violence.
Dans cet ordre d’idées, Janine Krieber soutient que « la particularité du terrorisme est d’être une forme de violence. Ceci en ferait donc un phénomène aussi vieux que l’humanité elle-même (…) Si le terrorisme est une forme de violence qui épouse les structures sociales, il peut donc surgir n’importe où dans ces mêmes relations lorsqu’il y a conflit ».[7]
Par ailleurs, la violence doublée de terreur constitue un fait social majeur à la base de la formation et la consécration de l’Etat en relations internationales. C’est parce que l’usage de la violence ne devrait plus relever du ressort de tout celui qui en avait la prétention et/ou la capacité que le besoin de création de l’Etat s’est imposé. Ce, pour assurer la protection de tous les citoyens, particulièrement de plus faibles menacés explicitement ou tacitement par les plus forts. L’Etat a ainsi été érigé en la seule instance jouissant de la légitimité de l’usage de la violence physique. Ceci ne l’autorise pourtant pas à la commission de la terreur à l’encontre de qui que ce soit. Et c’est justement parce que l’Etat a été, à un moment, jugé coupable de terreur qu’aurait été forgé, dans le vocabulaire français, le terme de terrorisme pour en rendre compte.
A cet effet, Martin Kalulambi Pongo et Tristan Landry sont assez explicites en indiquant que, « s’il faut se fier à la réflexion française, “le mot terrorisme est historiquement daté : il remonte à la terreur instaurée par Robespierre en 1793. Il a fait son entrée dans les dictionnaires pour désigner la propagation de cette terreur d’Etat.” Ailleurs, en Russie, la date de naissance incontestée du terrorisme moderne est 1878 ; date à laquelle le gouverneur de Saint-Pétersbourg a été assassiné par une populiste russe du groupe Narodnaia Volia (La volonté du peuple) ».[8]
Il est évident que l’usage de la violence visant à paralyser de peur un tiers considéré comme cible et/ou victime ne relève pas de l’apanage de l’Etat. Cela peut aussi être le fait d’une personne ou d’un groupe de personnes physiques ou morales. De la sorte, l’Etat peut être autant l’auteur[9] que la cible et/ou la victime du terrorisme. Ceci est d’autant plus évident que, depuis la fin de la Guerre Froide, moult Etats, notamment les pays du bloc occidental, sont engagés dans une « guerre » contre le terrorisme. Quelle que soit la lecture qui peut être faite sur les « attentats du 11 septembre », un fait s’avère on ne peut plus indubitable : il s’agissait d’une « scène » inédite de violence terrifiante.
Le terrorisme, en tant que violence-terreur, n’est pas une fin en soi. C’est un moyen par lequel son commanditaire ou son auteur résout de communiquer pour faire valoir son point de vue ou, le moins, obtenir la prise en compte de ses revendications dans une interaction sociale, ou encore passer un quelconque message. C’est à ce titre que « Le terrorisme ne doit pas être vu comme une finalité, mais bien comme une tactique ou une stratégie, qui relève d’abord de considérations politiques et communicationnelles, mais qui peut également recouper des impératifs militaires ».[10]
Suivant les considérations du champ de la négociation, le terrorisme relève ainsi de la stratégie coercitive dans la mesure où elle vise à presser la partie considérée comme antagoniste à adopter des postures souhaitées sur une question donnée. Il y a donc une rationalité, dont il faille au départ se garder de tout préjugé et de toute qualification axée sur les valeurs, à ressortir de la production de cette violence-terreur.
Il est à ce propos non moins intéressant de prendre bonne note de l’observation de Yves Lacoste quand il explique que, « pour comprendre un conflit ou une rivalité géopolitique, il ne suffit pas de préciser et de cartographier ses enjeux, il faut aussi essayer (…), surtout quand les causes sont complexes, de comprendre les raisons, les idées de ses acteurs principaux (…), chacun traduisant et influençant à la fois l’état d’esprit de la partie de l’opinion publique qu’il représente. Le rôle des idées, même fausses, est capital en géopolitique car ce sont elles qui expliquent les projets et qui, autant que les données matérielles, déterminent le choix des stratégies ». [11]
C’est alors qu’il est possible de réussir à en déceler le sens sur base duquel, en tenant compte de la singularité de l’espace de commission d’un acte terroriste, il pourrait être mieux envisagé de mettre en place des mécanismes susceptibles de s’avérer efficaces pour la prévention et la lutte contre ce phénomène. Car il ne suffit pas d’agir contre le terrorisme mais plutôt de s’assurer préalablement de la marge d’efficacité de l’action à mener à cet effet. Car cette lute peut provoquer des effets boomerangs.
Dans leur Dictionnaire des relations internationales, Dario Battistella et autres auteurs affirment que, « de très nombreuses définitions du terrorisme ont été avancées depuis des décennies. Celles-ci convergent dans l’ensemble vers trois critères. En premier lieu, le terrorisme renvoie à une forme de violence organisée, à la différence de la violence spontanée de type émeute ou insurrection. C’est en second lieu une violence sous-tendue par une cause politique au sens large (incluant éventuellement une dimension religieuse), en tout cas irréductible à une violence privée de nature purement criminelle ou mafieuse. (…) En troisième lieu, l’acte terroriste vise plus à déstabiliser un ennemi qu’à le détruire ».
Il en ressort que le terrorisme soulève des problèmes sécuritaires relevant de l’ordre public. Quelle qu’en soit la cible, c’est une entreprise qui met au défi une société humaine, érigée ou non en entité étatique, qui doit en être interpellée et créer les conditions optimales de sécurisation des personnes établies sur l’espace auquel elle s’identifie. C’est à ce titre qu’il est légitime que le concept de terrorisme soit répertorié dans un dictionnaire des relations internationales dont l’Etat demeure l’acteur principal en dépit de la montée en puissance des acteurs non étatiques auxquels il offre l’assise territoriale et confère la nationalité.
S’inscrivant de plus en plus, au niveau international, dans une logique de déterritorialisation, le terrorisme participe à la métamorphose anatomique de la menace qui pèse sur la sécurité des Etats et des peuples. Les mouvements terroristes accroissent la menace en se connectant les uns avec les autres bien que leurs ambitions de départ n’aient pas été similaires. Le terrorisme, quel qu’il soit, constitue dès lors un motif de mobilisation des membres d’une collectivité publique pour prévenir et, éventuellement, réagir vigoureusement face aux entreprises terrifiantes auxquelles, ils sont exposés tant à l’intérieur qu’au-delà de leur espace d’identification.
Ceci met en évidence la nécessité d’une large coalition internationale pour lutter contre cette adversité à laquelle aucune entité territoriale n’échappe de nos jours. L’ONU, unique organisation intergouvernementale à la fois politique et universelle, constitue le cadre idéal à cet effet. Car sa mission principale consiste à assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Mais les différences de perception et les divergences d’intérêts des Etats, notamment au sein du Conseil de sécurité, rendent rude la réalisation de cet objectif.
I. 2. Défi de définition consensuelle du terrorisme à l’ONU
De 1945[12] à 1960, les actes terroristes étaient des moyens pour obtenir l’indépendance de peuples dominés, pour faire entendre une cause de libération et d’émancipation. L’enjeu est alors l’occupation d’une terre et la reconnaissance de droits pour un peuple et une communauté. A partir de 1968, le terrorisme semblait évoluer vers un sous-produit de la Guerre Froide : des groupes cherchant à déstabiliser les Etats constitués, essentiellement à l’ouest, visant à catalyser la mobilisation populaire et à précipiter la Révolution. Dès 1989, cette motivation décline et laisse place à un terrorisme essentiellement islamiste visant à lutter contre l’impérialisme occidental en même temps qu’on assiste à une globalisation du terrorisme et à sa diversification.[13]
Depuis les attentats du 11 septembre 2001, le terrorisme est devenu un phénomène d’ampleur mondial. Il a bouleversé l’architecture sécuritaire des États en commençant par les États-Unis d’Amérique après la chute des deux tours du World Trade Center. D’autres pays occidentaux, tels la Grande-Bretagne, l’Espagne, la France, la Belgique, ont subi des attaques terroristes sur leur territoire. L’Afrique n’en est pas épargnée au regard des actions terroristes ayant endeuillé la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, l’Egypte, la République Démocratique du Congo, la Tanzanie, le Kenya, etc. Il y en a eu également dans d’autres continents.
Cependant, malgré l’accroissement de la menace que le terrorisme fait peser sur la sécurité des Etats, les multiples tentatives onusiennes d’élaboration commune, par tous les Etats, d’une définition à portée générale de ce phénomène se sont avérées infructueuses jusqu’à présent. Si le Conseil de Sécurité considère « que de tels actes (à savoir : des attaques terroristes commises le 11 septembre 2001 à New York, à Washington et en Pennsylvanie), comme tout acte de terrorisme international, constituent une menace à la paix et à la sécurité internationales »[14], il n’en donne aucune indication précise sur la teneur du terrorisme. Malgré tout, cet organe principal de l’ONU a jeté, à travers cette Résolution, les bases de la lutte contre le terrorisme suivant le Chapitre VII de la Charte constitutive de l’institution onusienne.
Plutôt que de favoriser un rapprochement de vues à valeur universelle sur la nature du terrorisme, cette Résolution participe à en renforcer davantage la confusion. Car elle procède d’une discrimination dans la mesure où elle se fonde uniquement sur les violences terrorisantes dont les populations américaines ont été victimes en 2001. Si le Conseil de Sécurité n’a pas tort de prendre suffisamment la mesure de ces attaques contre les symboles de la puissance américaine, il y a lieu de constater que, sous d’autres cieux, il n’accorde pas autant d’attention à la terreur infligée, par des acteurs étatiques ou non étatiques, à des populations civiles.
Il n’est pas curieux que l’ONU, qui bénéficie des contributions et cotisations substantielles des USA, ait réagi promptement, sous l’impulsion de ce dernier pays, en prenant des mesures urgentes face à une menace pesant sur la sécurité américaine. Il va sans dire que la lutte contre le terrorisme dans le cadre onusien ne se soustrait pas de la logique de puissance à laquelle chaque partie prenante s’inscrit en cherchant à faire prévaloir sa lecture de ce fait social pour mieux en tirer partie dans la mise en œuvre de sa politique extérieure. En effet, le discours politique sur le terrorisme participe à une démarche de légitimation de la politique des Etats tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de leur territoire.[15] Le terrorisme devient à cet effet, l’objet de sécuritisation.
Dès lors, définir le terrorisme au sein du cercle onusien relève moins d’une ambition fondée sur la rigueur analytique que d’une bataille de perceptions de ce phénomène sur un fond de quête d’influence. De la sorte, l’ONU se disqualifie quant à sa capacité à se constituer en une entité de référence dans la perspective de rendre assez intelligible les contours du terrorisme en tant que phénomène social dont il faille questionner les causes profondes en vue de la mobilisation des moyens pour le combattre. En effet, elle est, non seulement, une tribune d’échanges et de débats visant à éviter l’éclatement d’une nouvelle Guerre mondiale, mais aussi, un cadre d’expression de la puissance des Etats.
Dans ce contexte, l’acteur le plus influent dispose d’assez de marge de manœuvre d’imposer des mots pour faire prévaloir sa lecture des réalités sociales. Il va sans dire que l’entreprise définitionnelle du terrorisme sur la base d’un consensus au niveau des Etats constituera encore un défi de taille dans les relations internationales modernes. La conséquence qui en découle est que, dans bien des cas, « un Etat est porté à qualifier de terroristes les actes de violence perpétrés par des acteurs qu’il veut désigner à la réprobation publique, et à éviter le mot dès lors qu’il s’agit d’actes commis par un groupe pour lequel il éprouve sympathie ou indulgence ».[16]
C’est dans le même fil d’idées qu’il est soutenu que « de toutes les questions qui hantent le débat et les politiques à l’égard du terrorisme, celle de sa définition est la plus ardue. Cette persistance est, en soi, à la fois problématique et révélatrice. Au cours du demi-siècle écoulé, alors que le terrorisme devient une question de plus en plus présente dans les relations internationales et qu’il se manifeste au sein de nombreuses sociétés de par le monde, les tentatives d’y faire face buttent, tôt, sur la double question de circonscrire sa spécificité et nommer sa nature.
Les différences d’appréciation de telle ou telle caractéristique, l’importance attribuée à cette causalité ou celle-ci et la priorité donnée à ce paramètre au lieu de celui-ci se télescopent sans cesse, se jouant, de plus, en parallèle avec la dimension la plus difficile, à savoir celle de la subjectivité. Si tel groupe est considéré (comme) terroriste par cet État, il ne l’est pas forcément par cette autre nation et vice-versa ».[17]
Par conséquent, chaque Etat dispose de la latitude de déterminer, notamment sur l’espace dévolu à l’exercice de sa souveraineté, non seulement, les contours du contenu spécifique qu’il donne au terme « terrorisme », mais aussi, les mécanismes de répression ainsi que les modalités de réparation en faveur des victimes. Cette démarche tend généralement à privilégier la perspective axée sur l’aspect sécuritaire. En effet, c’est l’affirmation existentielle de l’entité étatique qui en constitue l’enjeu majeur.
Dans ce monde de l’après-guerre froide marqué par l’effritement continu du différentiel entre la politique intérieure et la politique extérieure, la lutte contre le terrorisme met en évidence la nécessité de la conclusion, par les Etats, d’un accord à portée générale et universelle du terme « terrorisme ». Ceci participera à la création des conditions de l’effectivité d’une très large coopération judiciaire au niveau international sur cette question. Ce, bien qu’il existe des instruments internationaux qui prévoient et organisent la répression d’actes de terrorisme.[18]
Selon Ghislaine Doucet, « en décidant d’exclure le terrorisme de la compétence de la Cour Pénale Internationale (CPI) au motif que cette infraction n’était pas définie, les Etats ont renoncé, au moins provisoirement, à l’instauration d’une réponse pénale universelle au terrorisme. Les disparités nationales qui en résultent sont préjudiciables tant aux victimes qu’aux auteurs et complices de crimes de terrorisme ».[19]
Elle soutient également qu’« Au vu de cette dépendance affichée entre la définition du terrorisme et sa sanction pénale, il importe donc de s’interroger (1) sur la réalité de la corrélation entre l’organisation de la répression du terrorisme et la nécessité d’une définition politique du terrorisme, (2) sur la qualification des infractions incriminées au regard de la compétence de la CPI afin de savoir si les crimes de terrorisme en sont réellement exclus ».[20]
Force est de constater que les médias, notamment occidentaux, mettent l’accent sur le terrorisme djihadiste qui constitue un type de terrorisme. Cela participe à faire ombrage au point de dénier le caractère « terroriste » à d’autres types de violence-terreur dont des populations civiles autant que des Etats sont victimes. C’est le cas de la République Démocratique du Congo (RDC) qui est confrontée, depuis plusieurs années, à des actions néfastes des mouvements décidés de terrifier et de causer des souffrances aux populations, y compris celles pour lesquelles ils disent mener la lutte. Il est non moins intéressant de s’en appesantir dans la perspective de la prise en charge globale de la problématique du « terrorisme ».
II. ACTIVITES TERRORISTES EN RDC
A l’instar des autres entités étatiques du monde, la RDC est confrontée aux activités des organisations « terroristes ». Il en existe trois types représentés chacun par un archétype. Il s’agit de types mystico-religieux symbolisé par Bundu Dia Kongo (BDK), traditionnaliste incarné par Kamwina Nsapu ainsi que djihadiste figuré par les Forces Démocratiques Alliées (ADF). Nous évoquerons plus longuement le cas Bundu dia Kongo que les deux autres.
II. 1. Bundu Dia Kongo, une menace terroriste quasi voilée
II. 1. 1. Présentation du BDK
a. Origine et objectifs du BDK
Dans un Rapport de l’ONU, BDK est présenté comme « un mouvement politico-religieux créé en1969. Il a pour objectif de promouvoir : la « renaissance » du peuple africain et de ses valeurs spirituelles, culturelles, morales et sociales ; la réappropriation des ressources dans la zone géographique définie par le BDK comme le « Royaume de Kong » et la réunification des peuples du royaume, ainsi que l’établissement d’un système politico-administratif décentralisé qui permettent aux habitants de Kongo de prendre en main leur avenir politique et économique. La dimension religieuse ou spirituelle du groupe se manifeste à travers l’organisation régulière de rituels et un « Livre Saint » ».[21]
Du point de vue étymologique, Bundu veut dire assemblée, union … Kongo est le nom du Dieu de l’amour et de la sagesse qui rassemble et conserve l’univers. Dans ce sens, Bundu Dia Kongo veut dire l’Union mystique Kongo.[22] Jadis chef de section de laboratoire de bactériologie à l’Institut de médecine tropicale à l’hôpital général de référence de Kinshasa (baptisé Mama Yemo, du nom de la mère du Président d’antan Mobutu), Ne Muanda Nsemi ne Makandala, député national depuis 2006, se présente comme « un maître de la Sagesse kôngo ».[23] Il indique que Bundu Dia Kongo est un mouvement de libération culturelle, spirituelle et matérielle de l’Afrique. Il est investi d’une mission divine de réformateur social au cœur de l’Afrique. Il a comme objectif : travailler pour réhabiliter la culture kongo, son histoire, sa sagesse, donc sa tradition religieuse ancestrale.[24]
Ce mouvement considère que c’est le peuple Kongo qui a fécondé l’Egypte antique et le cœur de l’Afrique. Il va sans dire que ce mouvement est la renaissance de l’ancienne école initiatique Kongo, à vision globale et dont la philosophie est fondée sur le principe trinitaire « amour-intelligence-pouvoir de Dieu ». En effet, c’est par son intelligence (science) que Dieu a créé l’univers ; c’est par son amour (religion) qu’il conserve l’unité de l’univers ; et par son pouvoir (la politique) qu’il gouverne l’univers.[25] Bundu Dia Kongo croit avoir la vocation d’agir sur toute l’Afrique noire bien que sa zone de prédilection serait la province du Kongo centrale en RDC.
Le mouvement Bundu Dia Kongo se présente comme étant inscrit dans la suite de la réalisation de la prophétie de Yaya Kimpa Vita « mavimpi ma katiopa mana tuka mu ntimansi » (la prospérité de l’Afrique proviendra de l’Afrique centrale). De la sorte, le Bundu Dia Kongo est un mouvement de résurgence au Kongo Central. En effet, le chef spirituel de BDK dit avoir reçu, à partir du 03 juillet 1969, une série de visions[26] suivant laquelle l’archange de Dieu Akongo lui aurait confié la mission de ramener les Bakongo à leur premier amour. Celui-ci serait la pratique de leur culture et tradition. Sa mission consisterait alors à inciter la prise de conscience du fait que l’Etat suprême a choisi le peuple Kongo comme lumière qui doit guider le peuple noir de toute l’Afrique jusqu’au rétablissement des cultures africaines et le développement intégral de tout le continent africain.
Selon ses statuts, Bundu dia Kongo milite pour[27] :
- la protection de la culture et de la langue des Bakongo ;
- la restauration des religions traditionnelles africaines en général, et celle des Bakongo en particulier
- la réhabilitation des systèmes politiques de l’Afrique précoloniale pour une orthopraxie africaine ;
- la reconfiguration géographique et politique des États africains de manière à faire revivre les anciens royaumes africains au sein des États cohérents. Un accent particulier est mis sur la réalisation de l’unité politique et culturelle des Bakongo.
De cette dernière préoccupation découlent d’autres objectifs beaucoup plus spécifiques et à court terme. Il s’agit de[28] :
- l’établissement d’un Etat fédéral en République Démocratique du Congo ;
- l’éradication des injustices sociales et politiques « imposées » aux Bakongo par les différents gouvernements qui se sont succédé à Kinshasa depuis le 30 juin 1960 ;
- l’abolition des « privilèges » accordées aux « non-originaires » établis au Bas-Congo au détriment des « originaires » ;
- la revalorisation et l’érection du Kikongo (la langue des Bakongo) en « langue nationale » de l’espace Kongo.
b. Champ d’action du Bundu Dia Kongo
Pour désaculturer les Noirs se trouvant dans tous les coins du monde, Bundu Dia Kongo a un rayon d’action très étendu. Pour cela, son premier axe d’implantation est l’espace culturel kongo. Il s’agit ici de l’Angola, la RDC, la République du Congo (Brazzaville) et le sud du Gabon. Le combat de Bundia Dia Kongo consiste alors à matérialiser l’idéal kongo.[29] Il s’agit d’un combat d’idées et non celui des armes. La stratégie est de convaincre afin de remplacer les idées fausses et négatives par les idées vraies. Il s’évertue d’expliquer par ses écrits qu’on ne peut attaquer que par les idées et riposter par les mêmes moyens.
Ces idées fausses, il faut les rechercher dans les religions coloniales, en sciences et en politique. L’objectif final reste la victoire sur le faux pour faire régner le vrai, c’est-à-dire la vérité, la justice, le bonheur et la paix sociale. Dans une autre option, Ne Muanda Nsemi a sa propre mission. Comme le gardien de la tradition négro-africaine et de la sagesse négro-africaine, sa mission est de préparer l’Afrique centrale à bien aborder les grands bouleversements du troisième millénaire.
c. Organisation du Bundu Dia Kongo
Ce mouvement a à sa tête un chef spirituel, le Nlongi’a Kongo, qui en est le visionnaire, le père des Bakongo. Il en assure la coordination et le fonctionnement. Ne Muanda Nsemi est le chef spirituel du Bundu Dia Kongo étant un roi-prêtre comme jadis « Kenatu » (akhenaten) ainsi que d’autres rois de l’Ethiopie et de l’Egypte antique. Ne Muanda Nsemi occupe une place importante dans les hiérarchies célestes en tant que « ne Makandala », car il est présenté comme le berger de douze tribus de la lumière du monde.
Il est assisté de trois conseillers qui représentent, chacun, les pays membres de l’ancien royaume Kongo (Angola, RDC et République du Congo). Après les conseillers, les chefs des centres. Chacun de ces derniers pays représente un centre, qui est l’ensemble des associations nationales. Le chef de centre implante sous sa juridiction les sections, et nomme les autorités sectionnaires. Chaque section dispose d’un directoire qui est un corps sacerdotal composé de quatre personnes. Outre le directoire, il y a le directeur de section et un adjoint ainsi que deux prêtres ayant la tâche de rapprocher les demandes des hommes aux ancêtres et à Dieu.
d. Idéologie de Bundu Dia Kongo
Ce mouvement est fondamentalement attaché à sa trilogie fonctionnelle (religion, science et politique). Il soutient que ces trois dimensions de la vie sont indissociables. Ne Muanda Nsemi explique que « l’ethnie kôngo est issue d’un patriarche appelé Kongo Nimy qui a mis au monde trois enfants : Nsaku, Mpanzu et Nzinga. Nsaku était grand prêtre, c’est-à-dire la religion ; Mpanzu était forgeron, la science appliquée et Nzinga était roi, donc la politique. Les trois ancêtres des Bakongo, à savoir Nsaku, Mpanzu et Nzinga, sont en fait l’incarnation sur la terre de la religion, de la science et de la politique ».[30] A la suite d’une cérémonie au cours de laquelle on aurait posé sur « moi le cintre de feu », je suis « devenu Nsaku, Mpanzu et Nzinga… ».[31]
Ne Muanda Nsemi considère que Bundu Dia Kongo, autant que le mouvement de Dalaï Lama au Tibet, d’un mouvement politico-religieux israélien représenté au Knesset, ou même au Christianisme, sont des « des mouvements de l’Ere nouvelle. Il y a tout un tas de précurseurs à travers le monde qui annoncent l’avènement du Christ. Puisque le Christ sera roi et prêtre, beaucoup de précurseurs de cet avènement se manifestent déjà comme des chefs politico-religieux ».[32] Il y ressort que Bundu Dia Kongo est un mouvement messianique.
A cet effet, il exhorte les Noirs à prendre conscience qu’ils ont leur dieu manifesté par un archange noir. Ils doivent de ce fait chercher à le connaître et à le servir. Il va sans dire que Ne Muanda Nsemi se bat pour convaincre ses semblables noirs de se détourner des messagers étrangers ainsi que des dieux d’ailleurs. Considérant que chaque race a son dieu.
Selon Bundu Dia Kongo, la condition sine qua non du développement de l’Afrique consiste pour son peuple avant tout, de revenir sur la connaissance de son dieu. De ce fait, le dieu des Noirs s’appelle Nzambi’a Mpungu ; son archange (c’est-à-dire celui qu’il a envoyé vers les Noirs) est Muanda Kongo ; son peuple élu est les Bakongo ; sa terre promise est le Kongo ; son prophète est Kimbangu ; son Livre sacré est le Makaba. C’est ce dieu qui, en vertu de son caractère à la fois omniscient et omnipotent, confère à son peuple le savoir et le pouvoir grâce auxquels il parvient au développement.
II. 1. 2. BDK, un acteur violent contre l’ordre occidental
a. L’ennemi de BDK
La vision de BDK consiste fondamentalement en une révolution à mettre en œuvre à l’effet de démanteler, sur le continent africain, le système d’organisation sociétale découlant de la Conférence de Berlin (1884-1885) et, partant, de la colonisation au terme de laquelle a été mis en place l’Etat importé de l’Occident.
En effet, « les puissances coloniales ont fait effort pour transporter en Afrique l’État moderne de type occidental, tel qu’il a pris forme en Europe depuis le XVème siècle ».[33] Ceci est perçu comme étant à l’origine de l’ankylose dont souffriraient les Africains ainsi que l’obstacle majeur au développement de l’Afrique qui croupit au bas de l’échelle mondiale en dépit des ressources naturelles innombrables dont elle regorge.
Il va sans dire que la conception de BDK met en lumière l’« ennemi » à combattre pour restaurer, en Afrique, la liberté et l’indépendance aux Africains. Cette vision de BDK est quasiment au bord de la portée conceptuelle de la civilisation que Samuel Huntington considère comme « le mode le plus élevé de regroupement et le niveau le plus haut d’identité culturelle dont les humains ont besoin pour se distinguer des autres espèces. Elle se définit à la fois par des éléments objectifs, comme la langue, l’histoire, la religion, les coutumes, les institutions, et par des éléments subjectifs d’auto-identification ».[34] Seulement, Huntington ne voit pas l’Afrique comme une civilisation en soi, préférant rattacher ce continent aux autres civilisations.
Suivant la grille de lecture de BDK, ceci relève pleinement d’une manœuvre visant à consacrer la négation existentielle des Africains et, partant, la légitimation des politiques de leur aliénation tant spirituelle que politique. Croyant et professant le destin spécifique des Africains, BDK perçoit l’action des Etats occidentaux en Afrique comme relevant d’une lutte de pouvoir consistant à détourner les Africains de leur destinée aux fins de vider leur substance existentielle. C’est à ce titre qu’il plaide pour le déracinement du construit occidental en Afrique, notamment les connaissances « scientifiques » transférées en Afrique ainsi que les valeurs judéo-chrétiennes.
C’est dans cette droite ligne que s’inscrit le projet de BDK pour la révision de la tracée des frontières des pays africains. De la sorte, BDK pense « exorciser » l’Afrique pour créer les conditions de son émergence et de son affirmation existentielle sur la scène internationale où elle reste marginalisée et passe toujours pour un objet des relations internationales. Il s’agit donc de rompre avec des considérations occidentales à la base de la tracée de ces frontières provoquant des hostilités et, par conséquent, la désintégration des Africains.
En effet, « au début du XXème siècle, la plupart des frontières de l’Afrique sont établies, annonçant la configuration des Etats à venir. Ces frontières tracées au gré des puissances coloniales, dans un contexte de rivalité entre celles-ci, ont, dans bien des cas, fait fi des réalités ethniques, linguistiques, religieuses et politiques des peuples africains. La négligence et la méconnaissance du substrat géographique et des divisions sociopolitiques traditionnelles engendrèrent une série de difficultés que les commissaires d’abornement furent les premiers à relever. Ils tenaient compte parfois des limites naturelles infranchissables, mais pouvaient aussi bien tracer des lignes droites sur l’inconnu et les appeler frontières ».[35]
C’est pour préserver, voire renforcer la substance existentielle des Africains que BDK prétend s’en prendre à l’ordre imposé par l’Occident aux Africains. S’il ne condamne pas cet ordre (à la fois spirituel, politique et matériel) en ce qu’il est par rapport à l’Occident, il le rejette en considérant qu’il ne peut être bénéfique qu’à l’Occident dans la mesure où il serait compatible à son essence. Ce qui ne serait pas le cas pour l’Afrique qui doit, à tout prix, retrouver et capitaliser ses spécificités spirituelles, politique et matérielle.
Force est de constater que la vision de BDK le projette au-delà, non seulement, de la RDC, mais aussi, de l’Afrique centrale. En effet, sa vision ne se focalise pas uniquement sur la restauration du Royaume Kongo. Elle préconise l’effacement de l’ordre occidental sur toute l’Afrique noire. De la sorte, BDK laisse entrevoir les contours de son champ d’action en fonction desquels il serait envisagé la mobilisation des moyens d’action contre l’Etat occidental que les colonisateurs ont imposé en Afrique.
Dans un contexte régional marqué entre autres par la montée en puissance de Boko Haram, affilié à l’Al-Qaïda au Maghreb Islamique, il est non moins scientifiquement légitime et politiquement prudent de ne pas exclure un éventuel projet de développement des mécanismes de rapprochement de ces organisations « terroristes » avec des mouvements anti occidentaux à l’instar de BDK. Jadis opérant dans le nord du Nigeria, Boko Haram a réussi à étendre ses activités funestes au-delà des frontières de ce pays au point de faire peser la menace sur des pays du sahel. Bien plus, « Francisco Caetano José Madeira, chargé de la lutte contre le terrorisme au sein de l’organisation (Union africaine, ndla), avait notamment dit craindre qu’elle (l’organisation Boko Haram, ndla) “pénètre dans la région d’Afrique centrale” ».[36]
b. L’usage de la violence par les adeptes de BDK
BDK est réputé aussi à cause de l’usage de violence auquel ses adeptes ont plusieurs fois recouru dans la perspective de tenter d’imposer la conception sociale de cette organisation à d’autres membres de la société congolaise. C’est à cause de la preuve d’une gouvernance locale consacrant l’usage de la violence en vertu de la doctrine religieuse de BDK que cette organisation a été frappée de dissolution par les autorités nationales de la RDC. Ceci est loin de constituer un fait banal dans la mesure où il préfigure l’ordre politico-religieux dont BDK préconise l’instauration non seulement au sein du Royaume Kongo restauré mais aussi dans toute l’Afrique occidentalisée.
Les Nations Unies avancent que « depuis 2000, de nombreux incidents meurtriers sont survenus entre ce groupe et les autorités congolaises. Ils sont le plus souvent liés à l’insuffisance des moyens de l’Etat de répondre de manière appropriée aux actes de provocation et aux agissements souvent violents du BDK, parmi lesquels des actes criminels allant du meurtre à l’usurpation de l’autorité publique. »[37] Dans un contexte de faible présence de l’Etat congolais dans certaines localités de la province du Kongo central (jadis Bas-Congo), les adeptes de BDK y ont saisi l’occasion pour imposer la marque organisationnelle de cette organisation dans les domaines comme la justice et la police. « Le BDK a ainsi pu se substituer à l’Etat, en établissant des tribunaux « traditionnels » chargés de proposer des solutions judiciaires alternatives avec l’appui d’une « police » connue sous le nom de « Minkenge » ou simples « Makesa » (des partisans) ».[38]
Plusieurs bavures ont été signalées. Selon les Nations Unies, « à Kinkenge (à 60 km à l’ouest de Luozi, territoire de Luozi), un officier de police nommé Bernard Muchipai, Commandant du poste de la Police Nationale Congolaise de Kinkenge, a été tabassé en novembre 2007. Dans le territoire de Tshela, Ngoma Vemba, Commandant du poste de Mbanza Muembe, aurait également été arrêté et passé à tabac par le BDK. Il a reçu des soins médicaux au couvent catholique de Tshela et a ensuite été transféré à l’hôpital de Kibunzi. Un ‘tribunal BDK’ a été mis en place dans la localité de Luozi.
Le 25 février 2008, un groupe d’environ huit membres du BDK s’est rendu au parquet pour demander la libération de trois prisonniers condamnés par une juridiction ordinaire, au motif que le jugement était inconstitutionnel. Les membres ont encerclé le parquet et demandé à s’entretenir avec le chef du parquet de Luozi. Parmi eux se trouvaient cinq leaders politiques de Luozi et trois ou quatre Minkenge étrangers à la localité. En l’absence d’une force de police suffisante, le Procureur a été contraint de libérer les condamnés. Le reste des détenus a profité de la libération pour quitter la prison à leur tour ».[39]
Bien plus, l’équipe d’enquête des Nations Unies rapporte que « le 24 février, dans le village de Kinkenge (à 60 km de Luozi), un groupe d’environ 15 partisans du BDK ont arrêté, « condamné » et brûlé vif un homme de Kimbala Zolele appelé Jean-Marie Luzende Evadi. Accusée de sorcellerie par le BDK, la victime aurait été tuée sur les ordres du leader local du BDK Mbuta Mansueki Zumbel ».[40]
En sus, « le 25 février, un homme du nom de Nestor Masanga (aussi connu sous le nom de ‘Tshiamali’) a également été brûlé vif à Bethelemi (à 10 km de Luozi) par des partisans du BDK du village voisin de Ndekolo. (…) Autour du 1er mars 2008, un capitaine des Forces Armées de la République Démocratique du Congo, John Kalima Birico, en voyage d’affaires à Nsundi-Kibunzi, a été « arrêté » par des partisans du BDK. Le BDK aurait soupçonné le capitaine d’être un espion à la solde du gouvernement. Il aurait été emmené à Kibunzi où il aurait été tué dans un endroit appelé Mbatakay puis enterré. L’exécution aurait été ordonnée par un autre leader du BDK de Kibunzi, Dani Mawanpengui ».[41]
Il est non moins intéressant de noter l’aspect cérémonial ayant émaillé l’immolation de Jean-Marie Lusende. « L’exécution de Jean-Marie Lusende prit les allures d’une cérémonie solennelle. Un trou d’environ un mètre fut rapidement creusé par les Mikengi. Le condamné y fut précipité et immobilisé entre 8heures du matin et 14 heures de l’après midi (T.G.B., 2005).
Après plusieurs heures de tortures, un pneu usagé apporté par un certain Fibarata dit « Rastaman » lui fut posé au cou, avant d’être allumé (V.S.V. 2008 : 4). Les mikengi présents se chargèrent alors d’alimenter la fournaise « au rythme des chansons de B.D.K. : « oooh tiya… ooh tiya» (l’hymne pour le feu) ; « minsiku mieto mie vutuka» (Nos lois sont de retour) (T.G.I/Mbaza-Ngungu, 2008).[42]
Dans un passé relativement récent, BDK a encore réussi à faire parler de lui en administrant la preuve de sa capacité de nuisance. Dans un Rapport adressé au Conseil de sécurité de l’ONU, le Secrétaire Général Antonio Guterres indique que « dans un contexte de crise politique et de transition au point mort, la violence a continué de se propager dans l’ouest de la République Démocratique du Congo. Dans la province du Kongo central et à Kinshasa, des installations stratégiques et les forces de sécurité congolaises ont récemment été prises pour cible par Bundu Dia Kongo (BDK) et Bundu Dia Mayala (BDM). Les actes de violence qu’il a perpétrés dans la capitale congolaise et la province voisine du Kongo central le 7 août ont entraîné la mort de 70 personnes ».[43]
De tout ce qui précède, il y a lieu de constater que les adeptes de BDK ont intégré dans leur agir social l’usage de la violence comme stratégie d’imposition de l’idéologie de ce mouvement politico-religieux. Ceci n’est point banal dans la mesure où, profitant de la faible présence de l’Etat dans certaines localités du Kongo central, fief de BDK, ce mouvement aurait dû recourir à des pratiques de gouvernance susceptibles d’attirer et de susciter la sympathie à son profit tant des populations locales que des pays africains auprès desquels il porte son message de révolution anti occidentale en Afrique. Au contraire, l’usage de la violence a atteint une proportion rompant avec tout humanisme. Que l’usage de la violence donne lieu à des activités cérémoniales atteste le risque de menace que fait peser BDK s’il venait à disposer de moyens financiers et logistiques pour renforcer son organisation et accroître sa capacité opérationnelle.
II. 2. Les cas Kamwina Nsapu et ADF
II. 2. 1. Le mouvement Kamwina Nsapu
Depuis 2016, la région de Kasaï, au centre de la RDC, est confrontée à un mouvement traditionaliste semant de la terreur contre les populations et les symboles de l’Etat congolais. Il s’agit du mouvement « Kamwina Nsapu », du nom du chef coutumier du territoire de Dibaya, dans la province du Kasaï Central. Le déclenchement de la production de cette violente terrifiante fait suite à l’assassinat du 6ème chef coutumier, du nom de Jean-Prince Mpandi par les forces de sécurité congolaises. Il s’en est suivi une mobilisation tous azimuts de ses adeptes contre le pouvoir politique en place au niveau national.
A l’analyse, ce sont des revendications sociales portées par ce dernier et auxquelles les autorités tant nationales que provinciales n’ont pas donné une suite assez favorable qui justifierait la forte mobilisation des personnes appartenant à son espace d’autorité coutumière et celles d’ailleurs à s’identifier à lui et, partant, à recourir à des pratiques magiques pour le venger d’une manière violente. Ce, dans cette partie du pays réputée pour être l’un de fiefs de l’opposition politique d’autant plus que l’opposant historique Etienne Tshisekedi est originaire du Kasaï Oriental.
La persistance de cette violence terrifiante n’est pas de l’ordre banal. Car, en s’attaquant à des institutions religieuses, comme l’Eglise catholique, réputées pour ses œuvres sociales et caritatives, il est inconséquent de ne pas prendre le risque de nocivité et de dangerosité que fait peser ce mouvement qui continue à mener des activités violentes en dépit des opérations militaires de l’armée régulière pour les neutraliser.
Quand on sait que l’avènement de Boko Haram fait référence à des revendications sociales non prises en compte en temps voulu par le pouvoir public, il y a lieu de ne pas négliger l’aventure de Kamwina Nsapu dont les conséquences pour la RDC et, au-delà de ce pays, pourraient causer plus de tort à la paix et la sécurité internationales dans la région. Ce, d’autant plus que ces violences ont provoqué un afflux massif de plusieurs centaines de milliers de réfugiés en Angola. En sus, les miliciens de Kamwina Nsapu réussissent à opérer à Kinshasa.
Il sied de noter aussi que la responsabilité du meurtre, au Kasaï, de deux Experts des Nations Unies, l’Américain Michael J. Sharp et la Suédoise Zaida Catalan, leur est imputée. Ces deux experts avaient la responsabilité d’y mener des enquêtes pour le compte du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Dès lors, l’affaire Kamwina Nsapu s’est internationalisée, et mérite d’être intégrée dans la réflexion générale sur la lutte contre le « terrorisme ». Ce, quelles que soient les reproches à adresser à l’Etat congolais.
II. 2. 2. Les ADF
Soupçonnées de bénéficier du soutien des islamistes Shebab somaliens, les ADF, mouvement djihadiste ougandais, opère cependant uniquement en RDC, dans le « Grand nord », au nord de la Province du Nord-Kivu. « L’ADF-Nalu est née au milieu des années 1990 de la fusion de deux groupes armés opposés au président ougandais Yoweri Museveni, au pouvoir depuis 1986. La composante Nalu (Armée nationale pour la libération de l’Ouganda) a depuis lors disparu, mais le mouvement conserve son appellation d’origine ».[44]
Un moment soutenu par le Soudan, les ADF étaient à l’origine composés essentiellement de militants du Tabliq, un mouvement missionnaire musulman. Au fur et à mesure des années, ces combattants se sont radicalisés. Aujourd’hui uniquement composée d’islamistes, l’ADF-Nalu est dirigé depuis 2007 par Jamil Mukulu, un chrétien converti à l’islam. Les États-Unis l’ont placé sur leur liste d’organisations terroristes dès 2001 et Jamil Mukulu est visé par des sanctions de l’ONU depuis 2011 et de l’Union européenne depuis 2012.[45]
Il leur est attribué la responsabilité de la mort d’une dizaine de casques bleus de l’ONU. « À l’est, la période considérée a été tragiquement marquée par l’attaque la plus meurtrière jamais conduite par un groupe armé contre les Casques bleus en République Démocratique du Congo , le 7 décembre à Semuliki (Nord -Kivu). L’attaque, qui a coûté la vie à 15 soldats tanzaniens et fait 44 blessés, a été imputée à des membres des Forces Démocratiques Alliées (ADF) ».[46]
III. L’EDUCATION, UN OUTIL DE PREVENTION ET DE LUTTE CONTRE LE TERRORISME
L’éducation est une donnée immatérielle d’une importance cruciale dans la détermination de la conduite des acteurs sociaux. En effet, elle participe à la programmation psychologique en fonction de laquelle est déterminé consciemment ou non l’agir comportemental de l’homme au sein d’une société. Ainsi, elle constitue une donnée infrastructurelle à la base de la construction de la personnalité de l’être humain, de sa perception des phénomènes sociaux et de ses interactions avec les « autres ». A ce titre, elle peut être mise à profit dans la perspective de prévention et de lutte contre le terrorisme. Il convient à cet effet de discuter de sa portée et de ses limites avant de proposer des pistes pour renforcer son utilité à cette fin.
III. 1. Portée et limites de l’éducation
III. 1. 1. Portée de l’éducation
L’éducation est un canal d’intégration de l’homme au sein de la société humaine. C’est amener l’homme à savoir vivre avec les autres en groupe, et, de la sorte, en faire effectivement un membre. Elle implique une dynamique par laquelle l’homme intériorise et assure la pratique des usages, l’observance des manières considérées collectivement comme positives au sein d’une société. Il s’agit d’un défi tant individuel que communautaire dans la mesure où, pour l’individu, ceci détermine son insertion sociale et, pour la communauté, c’est une garantie du maintien de l’ordre public et de la paix sociale.
L’éducation s’impose au genre humain. La relativité des jugements et des appréciations ne remet nullement en cause l’éducation. Elle soulève plutôt la problématique de son universalité et, partant, sa signification de manière univoque en tout temps et tous lieux. Le beau, le bien, le vrai, le pur, … sont inscrits dans l’homme qui en prend conscience et la mesure sur la base de la formation à laquelle il accède dans la perspective de constituer un agent de progrès de la société. De la sorte, l’éducation assure l’utilité existentielle de l’homme au regard des besoins et des ambitions de la société à laquelle il est identifié.
Car il y a nettement une visée à travers l’éducation. « L’étymologie du mot même l’exprime bien : éduquer, c’est conduire, donc guider vers un but. Conduire et nulle part s’excluent mutuellement. Mais conduire quelque part ne suffit pas ; la destination de l’éducation est par essence positive. On éduque au vrai, au bien, au beau, et non au faux, au mal, au laid. Que ces concepts se définissent par la voie idéaliste ou relativiste importe peu ici ».[47] A ce titre, Olivier Reboul avance que « l’éducation est l’ensemble des processus et des procédés qui permettent à tout enfant humain d’accéder progressivement à la culture, l’accès à la culture étant ce qui distingue l’homme de l’animal ».[48]
L’éducation est, à cet effet, un facteur non de moindre dans l’édification de toutes sociétés humaines. Elle est inhérente à l’interaction entre la société et l’homme telle qu’elle participe, d’une part, à la production du genre humain auquel aspire une société au regard des objectifs de divers ordres qu’elle poursuit, et, d’autre part, elle influe sur les comportements individuels et collectifs des sociétaires dont la société en éprouve les effets. C’est dans ce cadre que l’éducation peut être mise à contribution dans la stratégie de prévention et de lutte contre le terrorisme. Il s’agit de promouvoir les valeurs de paix, justice, respect de l’autre, … dans toutes les sociétés humaines.
Cependant, l’éducation ne relève pas de la neutralité. Elle est liée à chaque société humaine suivant ses croyances, ses valeurs, sa culture, etc. De ce fait, l’universalisation de l’éducation est à la fois, au sein de la société mondiale, un défi et une menace. Ce, d’autant plus que « Au fil du temps, des penseurs ont tenté d’assigner à l’éducation un but unique ou suprême qui reflète directement l’idéologie dominante : préparer l’entrée dans la cité de Dieu, faire un citoyen respectueux de la démocratie capitaliste ou un travailleur fidèle à la pensée de Mao… ».[49] Ce qui n’est pas de nature à favoriser la mobilisation simultanée de toutes les entités étatiques aux fins de la lutte commune contre le terrorisme. Ceci met en évidence les limites de l’éducation dans cette démarche.
III. 1. 2. Limites de l’éducation
Les limites de l’éducation dans la prévention et la lutte contre le terrorisme peuvent relever de plusieurs facteurs. Il est notamment question ici du défi et de la menace que constitue son universalisation au sein de l’espace international caractérisé par la lutte permanente de puissance entre les acteurs, principalement les Etats, qui y interagissent de manière continue et sans état d’âme.
Dans ce contexte, l’éducation relève consciemment ou non de la stratégie de domination, de contrôle, d’influence des uns au détriment des autres. Ceci donne libre court à l’exaspération des frustrations dans les rangs de ces derniers, et concourt par voie de conséquence à l’extrémisme violent ouvrant généralement la voie au terrorisme.
En effet, le discours axé sur l’éducation au niveau international passe en réalité pour la promotion et la propagation à travers le monde des connaissances scientifiques et des valeurs qui sont du ressort du monde occidental. De la sorte, l’éducation évoquée notamment dans le système onusien relève d’un outil au service de l’affirmation de la puissance du bloc occidental dans la vie internationale où cherchent à émerger d’autres entités étatiques et non étatiques ambitionnant d’exprimer leur spécificité culturelle ou leur désapprobation du modèle de vie occidentale qui leur est imposé suivant les mécanismes opératoires du hard power ou, surtout, du soft power.
Il est non moins intéressant, à ce sujet, d’indiquer l’un des objectifs de l’action diplomatique des Etats-Unis d’Amérique consiste à « exercer une influence sur les individus au sein d’un système complexe »[50] ; ce en déployant en « premier lieu des flux d’information et de communication, pour diffuser universellement ses valeurs, son mode de vie et son idéologie (…) ».[51] Ses valeurs sont alors présentées comme étant universelles, et constituant le critère d’appréciation des comportements des individus à travers le monde. Sur cette base, ils s’arrogent le pouvoir de déterminer le « bien » et le « mal », le « bon » ou le « mauvais », le « civilisé », le « moderne », l’«évolué », etc.
Dans ce contexte, force est de constater que l’UNESCO ne dispose pas d’assez de marge de manœuvre pour « assurer aux États membres l’indépendance, l’intégrité et la féconde diversité de leurs cultures et de leurs systèmes d’éducation (…) ».[52] En effet, elle est dans le fait un cadre de compétition des Etats pour l’affirmation de leur puissance culturelle, notamment en ce qui concerne l’éducation.
En somme, « au total, il faut bien reconnaître que le bilan de l’action culturelle, éducative, scientifique de l’Unesco est actuellement décevant. Aujourd’hui, l’Unesco n’est plus (si tant est qu’elle ne l’ait jamais été) un leader dans ce domaine au niveau international. Cet échec s’explique, on l’a vu, par la lourdeur et l’opacité de son fonctionnement administratif, par l’irrationalité de ses choix budgétaires, mais aussi et surtout par le manque de réelle indépendance politique de l’organisation par rapport aux États qui la financent le plus et, corollairement, par sa fragilité face aux pressions qu’ils peuvent exercer sur elle ».[53]
De ce fait, le champ de l’éducation reste ouvert à la compétition des sociétés humaines au point de constituer le cadre d’inspiration et de justification de l’extrémisme violent et du terrorisme. C’est dans cette optique que s’inscrirait Boko Haram, termes qui signifient « le rejet d’un enseignement perverti par l’occidentalisation ». En rejetant le modèle éducatif occidental, ce mouvement se lance dans une aventure visant à imposer un autre modèle qui, lui, est non sans conséquences néfastes sur le monde occidental. Cet autre modèle d’éducation prôné par Boko Haram ne diffère pas beaucoup de celui propagée par le BDK en ce sens que tous deux s’opposent au modèle occidental.
Sans porter un quelconque jugement sur tel ou tel autre modèle éducatif, il y a lieu, tout en condamnant les violences plongeant les populations dans la terreur quelles qu’en soient les motivations, de mettre sur le tapis la problématique de la diversité culturelle mise en mal par la « guerre » qui mine en sourdine ce secteur. Ce, au point de réduire les marges d’entente sur le contenu et les contours des valeurs reconnues et professées dans toutes les sociétés mais, curieusement, sur base desquelles le recours à la violence est justifié.
Ainsi, si l’Occident justifie son interventionnisme, notamment militaire, à travers le monde pour défendre la cause de la « paix », des voix d’élèvent pour faire remarquer qu’en réalité, ses activités industrielles participent largement à nuire à la paix. Leur condamnation des actes « terroristes » dérange des consciences leur reprochant d’en faire pareil sous d’autre forme.
« Au regard du paradigme de la sécurité humaine, on peut comprendre que les pays les plus puissants sont, au même moment qu’ils se veulent défenseurs des libertés publiques, auteurs des comportements à la fois conflictogène et crisogène. Il convient de rappeler que les plus importants fournisseurs d’armes sur le marché mondial chaque année regroupe les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité. (…) On est en droit de savoir comment ces pays arrivent-ils à concilier leur propension à défendre les exigences de la paix, de la sécurité et du développement durable de l’humanité avec celle de l’entretien du commerce de la mort à travers les armes qui font autant de victimes chaque année dans le monde ? »[54]
III. 2. Renforcement du rôle de l’éducation dans la prévention et la lutte contre le terrorisme
Le rôle de l’éducation dans la prévention et la lutte contre le terrorisme n’est point sujet à caution. Cependant, il importe, au regard des limites relevées ci-haut, de soumettre à la discussion quelques pistes visant à renforcer ce rôle au regard de l’objectif ainsi poursuivi. Il s’agit, d’une part, de la refondation du volet éducatif de l’action de l’UNESCO, et, d’autre part, du recadrage du modèle éducatif en Occident, et l’augmentation du taux d’accès à l’éducation scolaire.
III. 2. 1. Refondation de l’entreprise éducative de l’UNESCO
Dans un contexte international toujours marqué par la controverse sur le « choc de civilisations » comme discours face à la réalité sociologique de violence terrifiante au niveau international, il est non moins utile de discuter du reflet de la spécificité culturelle dans les modèles d’éducation en vigueur au sein des Etats membres. Ceci pourrait concourir à vider des motivations avancées ci et là de l’émergence des mouvements terroristes avançant de la décolonisation mentale des peuples leur cheval de bataille.
En outre, dans cette perspective, il y a lieu d’envisager mettre aux côtés des Etats au sein de l’UNESCO, d’autres acteurs sociaux, tels les dirigeants des communautés religieuses et des autorités coutumières, dont le statut sera à déterminer. En effet, ils sont à même de jouer un rôle significatif dans la réflexion et la mise en œuvre d’une démarche de repenser et de consolider l’entreprise éducative de cette institution internationale. Ce, face à la « guerre » en sourdine à laquelle prennent part des acteurs étatiques et non étatiques dans ce secteur. Il va sans dire que le rôle des Etats ne suffit pas dans un domaine aussi intégrateur, ou désintégrateur, des peuples que celui de l’éducation, la science et la culture pour endiguer l’expansion des réseaux professant l’extrémisme violent et, partant, le terrorisme.
III. 2. 2. Recadrage du modèle éducatif en Occident
Face au recrutement des activistes au terrorisme au sein même des pays européens, il y a lieu de repenser ce modèle tel qu’appliqué dans le vieux continent. En effet, la promotion des droits de l’homme et des libertés individuelles tend à porter atteinte à la pratique de ces mêmes droits. Il importe de mettre aussi l’accent sur les devoirs, notamment de l’enfant.
III. 2.3. Augmentation du taux d’accès à l’éducation scolaire
Au-delà de la discussion sur le substrat idéologique aux visées dominatrices que comporte la notion d’éducation, il y a la problématique de l’accès à l’éducation scolaire qui dispose des jeunes à mettre leur vigueur physique et leur solidité psychologique dans la production des violences terrifiantes. Ceci soulève la problématique de la pauvreté comme facteur de propagation de la pensée terroriste notamment dans les pays sous-équipés.
Que l’Eglise catholique en République Démocratique du Congo soit une cible des actions magiques aux effets nuisibles des miliciens de BDK et Kamwina Nsapu n’est pas anodine. Elle résulterait aussi de l’impossibilité financière des populations d’accéder aux services scolaires et sanitaires dont l’Eglise catholique est l’un des fournisseurs. Dès lors, cette dernière est perçue comme étant complice et profiteur d’un Etat ne remplissant pas convenablement ses obligations vis-à-vis des populations.
CONCLUSION
Depuis que les terroristes jihadistes (ADF), les terroristes mystico-religieux (BDK) et les terroristes traditionalistes (Kamwina Nsapu) ont commencé leur campagne de violence en République Démocratique du Congo, des intellectuels et d’autres commentateurs ont tenté d’expliquer la brutalité de ces groupes terroristes en invoquant l’absence de l’Etat, le chômage omniprésent, la pauvreté rampante, la corruption gouvernementale, le néocolonialisme, la religion dans l’environnement politique et la convoitise des richesses minérales de la RDC par ses voisins. Dans la sphère publique congolaise, les universitaires, les commentateurs et les représentants de l’État tels que les agences de sécurité, les gouverneurs provinciaux et les Assemblées provinciales ont généralement eu recours aux explications ci-dessus et ont fondé leurs réponses à la radicalisation et au terrorisme sur ces cadres analytiques.
Ces causes sont acceptables, mais tout en étant pertinentes à la montée de l’extrémisme violent dans le pays, elles ignorent le rôle central de l’éducation dans la préparation de futurs gouvernants et la nécessité d’améliorer le style de gouvernance de l’élite politique qui reste fondée sur une culture politique de l’intérêt personnel qui, du reste, est contestée par la majorité de la population surtout les jeunes qui, se trouvant dans le désespoir, rejoignent facilement les groupes terroristes et leur radicalisation à outrance les poussent à commettre des actes d’une violence inouïe contre l’Etat et les populations qu’ils considèrent comme complices.
Des efforts diplomatiques et politiques ont été déployés par les autorités congolaises pour faire inscrire les BDK et la milice Kanwina Nsapu sur la liste des groupes terroristes en Afrique. La reconnaissance de ces intégristes par la communauté internationale bien qu’étant une bonne chose dans le sens où il va permettre leur prise en charge dans la stratégie régionale de lutte contre le terrorisme ne suffit pas car ne pourra, elle seule, mettre fin à ce phénomène. Une approche holistique incluant l’adaptation de l’éducation scolaire et culturelle de nos jeunes aux réalités locales et internationales pour un changement de mentalités et un réveille de la conscience sur l’existence non seulement des droits de l’homme mais aussi des devoirs de l’homme devront être pris en compte.
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[2] SHAW M., «Conceptual and Theoretical Frameworks for Organised Violence», dans International Journal of Conflict and Violence, 2009, p. 3.
[3] HENNEBEL L. et LEWKOWICZ G., Le problème de la définition du terrorisme, s.é., s.l., s.d., p. 18.
[4] KRIEBER J., Op. cit.
[5] GAYRAUD J.F. et SENAT D., Le terrorisme, PUF, Coll. Que Sais-Je ?, Paris.2002, p.22.
[6] GRANGE N., « Le paradoxe du terrorisme. Pour une théorie des passions politiques », dans Les Champs de Mars, n° 22, 2011/2, p. 40.
[7] CAMPANA A. et HERVOUET G., Op. cit., p. 21.
[8] KALULAMBI P.M. et LANDRY T., Terrorisme international et marchés de violence, PUV, Laval, 2005.
[9] Le terrorisme permet ainsi « à l’Etat qui le pratique de punir des ennemis sans se faire voir (attentat de Lockerbie en 1988, fomenté par les services secrets libyens en réaction au raid américain su Tripoli de 1986, attentat contre l’immeuble de résidence du chef du Hezbollah en 1985 à Beyrouth imputé à la CIA, mise en causes des services pakistanais par l’Inde à propos des attentats régulièrement commis au Cachemire ou sur son territoire comme ceux de Bombay en 2008). Dans ces cas de figure (où la responsabilité de l’Etat impliqué est rarement avérée), le terrorisme apparait comme une action clandestine de la part d’un Etat qui souhaite recourir à la force sans avoir à en assumer les conséquences sur la scène internationale. Cf. Dario Battistella et alii, Dictionnaires de Relations internationales, Dalloz, Paris, 2006, p. 541.
[10] CAMPANA A. et HERVOUET G. (sous la dir.), Op. cit., p. 6.
[11] GOURDIN P., Op. cit., p. 309.
[12] Année de signature de la Charte constitutive de l’ONU à San Francisco aux USA.
[13] CALAUZENES J., « Le terrorisme depuis 1945 », disponible sur en ligne sur www.prepa-isp.fr, 2012, consulté en 2018.
[14] Cf. Paragraphe 3 de la Résolution 1373 du Conseil de sécurité de l’ONU adoptée le 28 septembre 2001, New York.
[15] RAMEL F., « Repenser le concept d’ennemi dans l’après-guerre froide », dans Stratégique, vol. 72, n°4, disponible sur www.institut-strategie.fr, consulté le 11 mars 2018.
[16] MELLON C., « Face au terrorisme quelques repères », dans Esprit et Vie, Mars 2003, disponible sur www.esprit-et-vie.com, consulté en 2018.
[17] BURKHALTER A., « Définir le terrorisme. Défis et pratique », dans Geneva papers, 2016.
[18] Cf. Les textes de ces instruments internationaux sont disponibles sur site de l’ONU :
untreaty.un.org/french/terrorisme.asp
[19] DOUCET G., « Terrorisme : définition, juridiction pénale internationale et victimes », dans Revue internationale de droit pénal, (Vol. 76), 2005/3, p. 252.
[20] Ibidem.
[21] Division des Droits de l’Homme de la MONUC et Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme, « Enquête spéciale sur les événements de février et mars 2008 au Bas-Congo », inédit, Rapport spécial, Mai 2008, p. 8.
[22] Ne MUANDA NSEMI, « Connaître le Bundia Kongo », Document de travail du BDK, juin 2012.
[23] MULUMBA K.F., « Ne Muanda NSemi, chef spirituel de Bundu dia Kongo : “Il faut absolument un mini-dialogue avant le 30 juin 2006…” », dans Le Potentiel, Kinshasa, 15 mai 2006.
[24] Ne MUANDA NSEMI, La sagesse africaine, Editions Mpolo Ngimbi, Kinshasa, 2003, p. 4.
[25] Ibidem.
[26] « J’ai commencé à voir un être géant qui mesurait à peu près quatre mètres. Et cet être est venu – on était en 1969, Kasa-Vubu est mort le 24 mars 1969 – me voir au mois de juillet, de la même année, pour me dire : « Vakatukidi nganga, nganga uvingananga vana (ça signifie : là où l’on a retiré un nganga (chef), un autre nganga doit prendre la place). Et il va ajouter : « Voilà la mission que vous allez assumer. Ca va être maintenant votre tour. Mais vous, vous serez à la fois un mélange de Kimbangu et de Kasa-Vubu », donc finalement un chef politico-religieux. » Cf. Interview de Ne Muanda Nsemi dans Journal Le Potentiel.
[27] MUZALIA K.G., « Bundu dia Kongo. Une résurgence des messianismes et de l’alliance des Bakongo ? », Thèse de doctorat en Sciences Politiques, inédit, Université de Gant, 2010–2011, p. 10.
[28] Ibidem, pp. 10-11.
[29] Ne MUANDA NSEMI, Connaître le Bundu Dia Kongo, Loc.. cit., p. 5.
[30] Interview de Ne Muanda Nsemi dans Le Potentiel.
[31] Ibidem.
[32] Ibidem.
[33] ALLIOT M., « L’État et la société en Afrique noire, greffes et rejets », dans Revue française d’histoire d’outre-mer, Tome 68, n°250- 253, 1981, p. 95.
[34] HUNTINGTON S.P., Le choc des civilisations, Editions Odile Jacob, Paris, 2005.
[35] OUATTARA L., « Frontières africaines 1964-2014. Le défi de l’intangibilité », disponible www.diploweb.com/Frontieres-africaines-1964-2014.html, Mars 2015, consulté le 11 avril 2018.
[36] KAPPES-GRANGE, A., « L’ONU confirme les liens étroits entre Boko Haram et Aqmi », dans Jeune Afrique, 29 janvier 2012, disponible sur www.jeuneafrique.com/177551/politique/l-onu-confirme-les-liens-troits-entre-boko-haram-et-aqmi, consulté le 08 avril 2018.
[37] Division des Droits de l’Homme de la MONUC et Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme, Op. cit., p. 8.
[38] Ibidem.
[39] Ibidem, p. 9.
[40] Ibidem, p. 10.
[41] Ibidem.
[42] MUZALIA K.G., Op. cit., p. 343.
[43] Nations Unies, Rapport du Secrétaire général sur la mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région, S/2017/825, 29 septembre 2017, paragraphe 6.
[44] KIBANGULA T., « RDC : les rebelles de l’ADF-Nalu, nouvelle menace pour le Nord-Kivu », dans Jeune Afrique, le 17 juillet 2013, disponible sur www.jeuneafrique.com/169625/politique/rdc-les-rebelles-de-l-adf-nalu-nouvelle-menace-pour-le-nord-kivu, consulté en 2018.
[45] Idem.
[46] Rapport du Secrétaire général sur la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo, S/2018/16, 5 janvier 2018, paragraphe 14.
[47] De LANDSHEERE V. et De LANDSHEERE G., Définir les objectifs de l’éducation, 3ème édition, Université de Liège, Liège, 1978, p. 5.
[48] REBOUL O., La Philosophie de l’éducation, PUF, « Que Sais-Je ? », 9ème édition, Paris, 1989.
[49] De LANDSHEERE V. et De LANDSHEERE G.,, Op. cit., p. 6.
[50] OUTIN S., « Les Etats-Unis : pour quelle puissance structurelle ? », disponible sur www.infoguerre.fr/fichiers/Puissance_Structurelle_USA, consulté le 23 mai 2018.
[51] Ibidem.
[52] Cf. Article 1, alinéa 3 de l’Acte constitutif de l’Unesco.
[53] MAUREL C., « L’Unesco aujourd’hui », Vingtième Siècle, dans Revue d’histoire, volume 2, n° 102, 2009, p. 143.
[54] ELIKA F., Géopolitique mondiale de l’ennemi et survie de la République Démocratique du Congo, Editions Science et Libertés, Kinshasa, 2006, pp. 141-142.